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Ouranos. Ce fut, paraît-il, une véritable tuerie, un « bain de sang » pour les légionnaires romains ; le vainqueur rapportait à Constantinople 1 000 têtes coupées et 12 000 prisonniers. Le tsar, après s’être dissimulé sous des tas de cadavres, put à grand’peine, par des chemins de bêtes fauves, gagner la région du Pinde. Basile II profita de la victoire de son lieutenant pour reconquérir non seulement la Thessalie et Durazzo, mais la majeure partie de la Bulgarie danubienne, jusqu’à Viddin.

La Bulgarie des montagnes de l’Ouest restait le morceau de résistance. Avant qu’on pût s’y attaquer, onze ans se passèrent encore, tandis que Basile consolidait sa puissance en Asie, complétait ses armemens ou, durant les années 1000 à 1004, les plus obscures de ce règne dans les annales byzantines, conquérait les places bulgares de la frontière, comme Berrhœa (Verria), Servia (Silvidtsé), Edesse de Macédoine (Vodéna), Vidyni (Viddin), Dorostol (Silistrie). Dans la désagrégation de son empire, Samuel retrouvait parfois toute son audace : durant l’été de l’an 1003, sur les derrières des troupes impériales occupées au siège des places danubiennes, en pleine fête de la « Dormition de la Vierge, » il surprit et saccagea Andrinople, que le prompt retour de Basile le contraignit d’évacuer. Les Byzantins le payaient de retour : comme il essayait de secourir Skopia (Uskub), assiégé par eux, il fut surpris à son tour, perdit quelques milliers d’hommes et dut fuir, abandonnant les richesses de son camp, Le chute de Skopia entraîna la conquête de la basse et moyenne Macédoine. On voit que le cercle se resserrait autour du massif montagneux, des villes royales d’Ochrida, Prilep et Prespa, qui formaient le dernier refuge et comme le réduit de la monarchie bulgare.

Ce fut une guerre de plateaux ou de défilés, comme en ont connu les généraux ottomans chargés de réduire les tribus albanaises ou le Monténégro, féconde en surprises et en retours de la fortune, harassante pour les troupes impériales, irritante pour le conquérant. Samuel en était réduit à éviter les batailles rangées. Il se contentait de barricader les défilés. C’est contre une de ces passes fortifiées, celle de Cimbalongou (mot évidemment valaque), sur la route de Sérès à Melnik, que se heurta de front, en 1014, l’armée de Basile II. Devant la vigoureuse résistance que lui opposait le tsar, le Basileus pensait à la retraite, lorsqu’un de ses lieutenans découvrit un défilé secondaire qui permettait de