Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 161.djvu/457

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ni l’empire grec ni l’empire bulgare n’étaient absolument nationaux. Dans le premier, nous rencontrons quantités d’enclaves slavonnes, de Slavinies, sans parler de l’irréductible masse albanaise. Le second ne reposait pas davantage sur une race homogène : il eut à compter avec les Croates, les Serbes et les Albanais ; les enclaves et colonies valaques devaient déjà y être nombreuses, puisque le troisième empire bulgare eut pour fondateurs des aventuriers de sang latin.

A Byzance le pouvoir impérial manquait de stabilité. Longue est la liste des empereurs qui périrent de mort violente et des usurpateurs qui firent sanctifier leur attentat. Rien que pendant la période aiguë de la lutte entre les deux races, on voit, sous Constantin le Porphyrogénète, le pouvoir usurpé par la dynastie de Romain Lécapène, qui est ensuite précipitée du trône. Les jours de Romain II et de Nicéphore Phocas furent abrégés par des crimes. Le règne de Basile II fut troublé par la double usurpation de Bardas Phocas et de Bardas Skléros. Cependant, durant cette période, on constate chez les Byzantins un sérieux progrès dans le respect de la succession légitime : Lécapène ne chercha pointa détrôner Constantin Porphyrogénète ; Nicéphore Phocas et Tsimiscès respectèrent les droits de Basile II et Constantin VIII. Ces espèces d’usurpateurs se contentèrent d’être associés aux princes légitimes, participant ainsi à leur légitimité de « porphyrogénètes. »

Même aux époques où le trône était le plus instable, les autres institutions l’étaient beaucoup moins. La « sacro-sainte hiérarchie » des fonctionnaires, l’énergie administrative et bureaucratique restaient intactes ; elles maintenaient, dans la capitale, l’ordre matériel, sur les frontières, le mouvement commercial et les recettes douanières, dans les provinces, l’autorité des stratèges et la perception à peu près régulière de l’impôt. L’autre colonne de la société, c’était l’Eglise, et, durant toute cette période, elle ne fut sérieusement inquiétée ni par Rome, ni par les hérésies.

Dans l’empire bulgare, l’instabilité du trône était pire qu’à Byzance : le tsar Pierre, l’héritier du grand Siméon, ne dut qu’à l’énergie du régent Soursouboul et à la destruction de ses frères aînés une tranquillité relative. Le tsar Samuel fut un fratricide et peut-être un parricide. Son fils Gabriel-Romain périt par son cousin Vladislav. D’institutions à vertu centralisatrice, on n’en