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REVUE LITTÉRAIRE

LES SPECTACLES DE LA FOIRE ET NOS SCENES DE GENRE

A côté des théâtres d’ordre, classés, catalogués, mis en exploitation régulière et qui sont donc de grands théâtres, nous avons vu depuis une quinzaine d’années se multiplier les entreprises particulières et pulluler les scènes hors cadre : Théâtre libre, théâtre d’Art, théâtre de l’Œuvre, théâtres de marionnettes, de pantomime, d’ombres chinoises, tréteaux, roulottes, guignols, cafés-concerts, cabarets littéraires et autres bouis-bouis. Ces théâtricules ne laissent pas que d’inquiéter les théâtres ; ceux-ci se plaignent qu’on détourne leurs spectateurs, crient à la concurrence déloyale, et regrettent, sans oser l’avouer, le temps où les troupes qui avaient un privilège pouvaient envoyer la maréchaussée aux troupes qui avaient un public. Le fait est que tout un public, et non le moins élégant, prend volontiers le chemin de ces petits théâtres où l’attire la promesse de spectacles un peu différens de ceux qu’il trouve partout ailleurs, plus curieux, plus piquants sinon plus délicats. Ce phénomène de la multiplication des théâtres d’à côté n’est pas sans importance, même pour l’histoire de l’art dramatique. Mais aussi il n’est pas nouveau. On l’avait vu déjà se produire de point en point au cours du XVIIIe siècle, avec toutes ses variétés et toutes ses conséquences. A côté de la Comédie-Française, du Théâtre Italien et de l’Académie de musique naissent et se développent les théâtres de la foire. Ils intéressent l’histoire des théâtres puisque nous leur devons nos modernes théâtres de genre. Ils intéressent l’histoire littéraire elle-même, puisque plusieurs formes de divertissement dramatique