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premiers jours où il ouvrit l’exposition du Pavillon royal d’Espagne. On y trouvera maints renseignemens utiles tant sur ces armes que sur les tapisseries. Parmi celles-ci je n’en signalerai qu’une, parce qu’elle montre, en action, les belles armes et ceux qui les portaient. Elle fait partie de la fameuse suite des douze panneaux tissés de laine, de soie et d’or, et qui est dite de la Conquête de Tunis. On sait qu’elles furent exécutées, en 1546, sur l’ordre de Charles-Quint, et d’après les cartons du peintre Jean Vermayen, par Guillaume de Pannemaker, à Bruxelles. Celle-ci représente la grande revue, passée par l’Empereur, sous les murs de Barcelone, en l’an 1535, avant l’embarquement pour Tunis. Dans cette intéressante composition, je ne retiendrai que la conscience et la sincérité. Nulle place ne dut y être laissée à la fantaisie. Le Flamand Jean Vermayen avait accompagné l’expédition. Il ne demeura point sans multiplier les croquis, et toute son œuvre fut faite d’après nature. Cette seule tapisserie suffit à me persuader de son exactitude, et je crois qu’on en peut recommander l’étude à ceux qui, dans le domaine de l’art, se piquent de serrer l’histoire de près.


II

Au contraire de l’Espagne, qui n’a exposé qu’un très petit nombre d’objets d’une valeur artistique singulière, la Hongrie nous a envoyé une quantité considérable de pièces. Aussi son pavillon présente-t-il un aspect tout spécial, notamment pour les armes. On y voit surtout des choses d’usage, et où la valeur archéologique l’emporte, dans la règle, sur la qualité artistique. On ne saurait s’en plaindre. Ce n’est plus là quelques casques et rondaches de grand luxe, choisis entre- tous pour nous fournir les plus beaux et les plus purs exemples de l’art des armuriers à la grande époque, mais bien une série considérable d’objets qui se rapportent à la vie courante. Disparates, au premier abord, ils ne tardent pas à donner à l’observateur patient une impression de continuité qui lui permet de bien comprendre l’histoire essentiellement guerrière de la Hongrie pendant plus de quatre siècles. Il convient donc de féliciter hautement et la couronne d’Autriche et la commission hongroise de l’importance de leur effort. Jamais, peut-être, autant de trésors du passé, appartenant à une même nation, ne se sont trouvés aussi utilement rassemblés.