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LE P. GRATRY




Le P. Gratry, sa Vie et ses Œuvres, par S. E. le Cardinal Perraud, évêque d’Autun, membre de l’Académie française. — Un vol. Téqui ; Paris, 1900.


Depuis des années le cardinal Perraud nous devait, il devait au P. Gratry, que dis-je ? il se devait à lui-même un beau livre, qu’il pouvait seul écrire et qu’il publie aujourd’hui. Il s’excuse, en sa préface, de l’avoir gardé et comme réservé cinq ans dans son esprit et dans son cœur. Mais de cette réserve, involontaire d’ailleurs, il semble que l’œuvre sorte plus claire, plus chaude aussi, et qu’une plus longue méditation, un souvenir plus longtemps fidèle accroisse la tendresse et la force du témoignage rendu.

On sait qu’avec le P. Charles, son frère, et l’abbé Perreyve, leur ami commun, le cardinal-évêque d’Autun fut jadis le disciple, le compagnon et le fils spirituel du P. Gratry. Attiré par lui à la vie sacerdotale, il vécut longtemps près de lui : non pas à son ombre, mais au contraire à sa lumière et comme dans son rayonnement. Il concourut avec lui à la restauration de cet illustre « Oratoire de France, » dont il devait être l’historien et dont il est aujourd’hui le chef. En 1872, quand le P. Gratry mourut, à l’étranger, le P. Perraud alla l’aider à mourir. Il avait reçu de lui la première touche divine ; il lui donna la dernière. Aujourd’hui enfin, en le faisant revivre devant nous, il achève de payer sa dette et consomme entre leurs deux âmes un long échange sacré.

I

Le P. Gratry a parlé dans les Sources de « cet unique travail que l’oracle imposait à Socrate dans sa prison, pendant les quel-