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Finances, sans oublier les rectifications nécessitées par certains changemens dans la manière d’écrire les budgets. On serait dupe, en effet, des plus graves illusions si l’on comparait brutalement, pour ainsi dire, les totaux des budgets entre eux sans tenir compte de « ce qu’on ne voit pas. »

Rapprochez, par exemple, purement et simplement le chiffre total des crédits ouverts aux ministres par l’article Ier de la loi de finances de cette année, pour l’exercice 1900, du total analogue figurant dans l’article 1er du projet de loi de finances pour l’exercice 1901 ; vous trouverez 3 547 millions pour 1900 et 3 551 millions pour 1901, et vous en conclurez que les dépenses pour 1901 sont augmentées seulement de la différence entre les deux chiffres, c’est-à-dire de 4 millions. Mais regardez les dessous : vous verrez que le total de 1900 contient le budget de l’Algérie, fixé à 71 millions, tandis que le projet de loi pour 1901 ne contient plus un centime pour l’Algérie, dont le budget est séparé de celui de la France. Du coup, sans aller plus loin pour le moment — (nous examinerons ceci en détail plus tard), — la différence apparente de 4 millions devient une différence réelle de 75 millions.

Autre exemple : lisez le Total des Recettes ordinaires du budget de 1870 tel qu’il figure dans les Résultats généraux officiels[1], vous trouverez 1 940 millions — (nous comptons seulement par millions, en arrondissant les chiffres) ; — vous avez vu que le budget proposé pour 1901 est évalué à 3 551 millions : vous en concluez que l’augmentation accomplie de 1870 à 1901 s’élève à 1 611 millions. Mais les totaux des tableaux publiés autrefois contenaient les « fonds spéciaux, » c’est-à-dire les sommes perçues par l’Etat pour le compte des départemens et des communes et restituées par lui aux budgets locaux ; aujourd’hui les tableaux budgétaires ne contiennent plus que les fonds de l’Etat exclusivement ; — il en est ainsi depuis 1893 ; — donc, pour comparer exactement les recettes ordinaires de 1870, il faut ajouter aux 3 551 millions actuels les 408 millions de contributions directes et taxes assimilées à percevoir en 1901 par l’Etat pour les départemens et les communes. L’augmentation des charges pesant sur les contribuables, calculées aujourd’hui comme en 1870, n’est donc plus seulement de 1 611 millions, mais de 2 019 millions.

  1. Voyez le Compte général de l’Administration des Finances pour 1896, pages 584 et 588.