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que la rente 3 pour 100 amortissable, dont les intérêts et l’amortissement sont inscrits pour 138 millions au chapitre 3 des Finances, et dont le capital atteint plus de 3830 millions, n’est remboursable que lentement, peu à peu, à longue échéance, par fractions relativement faibles : 25 millions par exemple pour l’année 1901. On croit encore que la dette flottante, dont les intérêts figurent pour 16 millions au chapitre 17 des Finances, qui peut, elle, être exigée en capital, plus ou moins intégralement, plus ou moins brusquement, par ses créanciers, ne dépasse guère 1 milliard. Le tableau reproduit au budget indique 1 054 millions (au 1er janvier de l’année courante), dont 939 seulement portant intérêts. En examinant le détail de ce tableau, on voit qu’il comprend notamment 309 millions appartenant aux communes, établissemens publics, etc. ; 32 millions à la ville de Paris ; 245 millions à la Caisse des dépôts ; 142 millions aux caisses d’épargne diverses, etc., etc. On en conclut que le Trésor risque, en cas de crise grave, de se voir mis en demeure, tout à coup, de rendre ces capitaux considérables confiés à sa gestion, exigibles à toute heure, à vue pour ainsi dire. La nécessité de tels remboursemens serait à coup sûr une difficile épreuve ; le crédit de l’État en recevrait une atteinte sérieuse et inévitable. Toutefois, l’opération ne serait pas impossible.

Tout cela n’est qu’apparence, illusion d’optique, rubrique trompeuse.

La dette perpétuelle est exigible pour près de 2 milliards en capital, et n’est perpétuelle que pour 20 milliards au lieu de 22 ; la Rente 3 pour 100 n’est pas amortissable seulement pour 25 millions de capital, mais elle est immédiatement exigible pour plus de 2 milliards sur 3 830 millions ; la dette flottante, en conséquence, s’élève à plus de 5 milliards au lieu d’un. Cinq milliards et demi de capitaux à la dette flottante, exigibles subitement, demain peut-être, impérieusement, sans délai possible, à l’heure où le Trésor aurait le plus pressant besoin de toutes ses ressources pour le salut de la France : telle est la réalité positive, en dépit des écritures officielles quelles qu’elles soient !

Comment en est-il ainsi ?

Par le jeu de nos caisses d’épargne privées et publiques, qui sont toutes obligées de verser leurs fonds au Trésor, lequel achète avec ces fonds des rentes sur l’Etat au nom de ces mêmes caisses d’épargne. Il enferme ensuite ces rentes dans ses coffres, à la