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place de l’or et de l’argent qu’il a reçu, mais il ne cesse pas de devoir uniquement, absolument, aux caisses d’épargne leur or et leur argent. Vainement il écrit, sur des titres de rentes 3 et demi ou 3 pour 100, le nom de telle ou telle caisse d’épargne : Caisse d’épargne de Rouen ; Caisse d’épargne d’Yvetot ; Caisse d’épargne de Carpentras ; Caisse d’épargne d’Annonay, etc. ; ces titres n’appartiennent pas à ces caisses malgré elles ; elles doivent aux déposans les sommes qu’ils ont versées, en espèces sonnantes et trébuchantes, et le Trésor leur doit, à elles, les mêmes matérialités monétaires métalliques. Actuellement le total des sommes ainsi dues par l’Etat aux caisses d’épargne et représentées par des titres de rentes dépasse 4 milliards. Le tableau de la dette publique en capital publié dans le Projet de budget de 1901 (p. 68) portant ces indications :


Francs
Dette consolidée 22 001 914 539
Rente 3 p. 100 amortissable 3 836 833 000
Dette flottante 1 054 106 181

doit donc être ainsi rectifié, pour être conforme à la vérité et pour ne pas égarer dangereusement l’opinion publique, les Chambres, le gouvernement lui-même :


Francs
Dette consolidée 20 030 000 000
Rente 3 p. 100 amortissable 1 741 000 000
Dette flottante 5 121 853 720

Supposons que la guerre éclate demain, qu’on doive faire face aux prodigieuses dépenses qu’elle entraînera dès le début, exigeant pour les premiers mois plusieurs milliards, et rembourser en même temps les 5 milliards de la dette flottante, dont les diverses créances seraient immédiatement réclamées ; par quels miracles le Trésor pourrait-il exécuter ces opérations également urgentes, également indispensables ? On ne saurait répondre qu’on usera de la clause légale permettant de retarder les remboursemens ; cet argument de tribune, qu’une Chambre résolue à fermer les yeux devant les difficultés et devant les faits désagréables peut applaudir, ne serait pas de mise devant les millions de familles laissées sans soutien, sans travail, sans salaire, par suite de la mobilisation générale et réclamant leurs économies pour vivre. On a donc ainsi créé inconsciemment, peu à peu, une