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par les redoutables projets de lois décorés du titre de « réformes » surtout quand ils sont le plus malfaisans ; le plus clair des économies réalisées par le pays s’en va dans les coffres de l’Etat qui ne saurait presque jamais l’employer aussi utilement que les particuliers qu’il dépouille, et le résultat le plus net d’un tel système est tout ensemble l’atrophie de l’esprit d’initiative privée, le ralentissement des progrès économiques, en attendant les complications financières qui signalent la décadence des peuples.

Aussi, tandis que la furie dépensière de la Chambre ne connaît pas de bornes, le mouvement de la richesse publique, du commerce extérieur de la nation, diminue ou se ralentit de la façon la plus alarmante.

Notre commerce extérieur spécial avait passé de 1 923 millions en 1851 à 6 228 millions en 1869, s’augmentant ainsi de 4 305 millions en dix-huit ans ; soit une moyenne annuelle de 239 millions. Pendant ce temps-là, il est vrai, nos dépenses totales avaient passé de 1 461 millions à 2 143 millions, soit une augmentation totale de 682 millions, et une moyenne annuelle de 37 à 38 millions. Cette augmentation de dépenses était élevée, trop élevée à coup sûr ; elle était au moins largement compensée par le développement considérable du commerce, qui traduisait lui-même les développemens parallèles de l’industrie, de l’agriculture, de tout l’ensemble du travail national. Ils se manifestaient en même temps par l’un des signes les plus exacts de la richesse publique : la valeur des successions, exprimée par l’impôt sur les héritages.

On admet généralement que la totalité des biens existant en France est soumise à l’impôt successoral une fois tous les trente-cinq ans, en d’autres termes que l’ensemble des successions soumises chaque année aux droits de mutation par décès représente la trente-cinquième partie des biens formant la fortune des particuliers ; de sorte qu’en multipliant par 35 la valeur des successions d’une année, on obtient le chiffre de la richesse de tous les citoyens. Des circonstances exceptionnelles pouvant réagir trop fortement, en plus ou eu moins, sur une année isolée, il convient de prendre la moyenne de trois années, pour approcher plus sûrement de la réalité. Procédant ainsi, nous constatons les faits suivans, d’après les comptes des recettes officiels publiés par le Ministère des finances.