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auxquels il répondait : l’autre sur le tiers parti catholique dont le duc de Bavière et son frère, l’électeur de Cologne, poursuivaient la formation, le sujet principal est traité avec mouvement, avec force, avec véhémence comme avec modération.

Richelieu récompensa Saint-Germain d’un service qui s’ajoutait à tous ceux que sa plume et son zèle laborieux lui avaient rendus depuis deux mois, en le faisant nommer à l’évêché de Toulon, devenu vacant par la mort de Gilles de Septres (1626). Mais l’institution canonique se fit attendre et, en fin de compte, ne fut jamais accordée. Le candidat s’en est pris au cardinal de cette déception ; il l’a accusé d’avoir traversé sa candidature et de l’avoir fait échouer. Mais on n’imagine pas pourquoi le succès de la présentation aurait été secrètement entravé par celui qui l’avait faite. Le bruit en courut pourtant, il faut l’avouer. Béthune le recueillit à Rome où il était notre ambassadeur ; il y crut et il commit la maladresse d’en avertir les intéressés au lieu d’en avertir le ministre. Celui-ci, dans le billet[1] d’un laconisme hautain qu’il lui adressa sur cette affaire, relève vertement ce procédé incorrect et déclare, avec une autorité convaincante, que le roi n’a rien à déguiser et que ses serviteurs exécutent loyalement ses ordres. En démentant la rumeur qui le représentait comme s’associant à l’opposition du nonce Spada, il révèle le plus puissant adversaire de l’évêque en expectative. Celui-ci, d’autre part, avoue, dans sa Lettre de change protester, que le cardinal de la Rochefoucauld a laissé surprendre et exploiter contre lui son « grand zèle. » Les vrais auteurs de son échec, les voilà. Et comment s’étonner, quand on se rappelle ses sentimens sur l’Eglise romaine, que la curie ait refusé d’octroyer des bulles épiscopales à un ecclésiastique aussi mal noté dans son esprit[2] ?

Ce qui prouve encore que l’échec de Mathieu de Morgues s’explique uniquement par les légitimes répugnances du Saint-Siège et non par un incompréhensible revirement de Richelieu, ce sont les compensations qui lui furent accordées, ses rapports

  1. Richelieu à Béthune, mai 1627. Avenel, t. II. p. 468.
  2. Dans une lettre à Jacques Dupuy, du 28 décembre 1626, Peiresc signale les inquiétudes de Saint-Germain, dont il était l’ami, au sujet de ses bulles, et ajoute : « L’on lui fait difficulté sur la conséquence de tenir un homme de ses sentimens si proche d’Italie, lesquels par contagion il pourroit communiquer au voisinage. » Dans une autre lettre au même correspondant du 1er août 1627, il regrette qu’un personnage de cette qualité soit perdu pour la Provence et pour lui. Cf. la Correspondance de Peiresc, publiée par Tamizey de Larroque.