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de guerre civile. Enrôlé d’abord dans l’armée de Condé, il ne semble pas qu’il y eût trouvé de nombreuses occasions de s’y couvrir de gloire. Las de vivre sur un sol étranger, il était parti en apprenant la chute de Robespierre, convaincu, comme la plupart des émigrés, que la Terreur touchait à sa fin. Il avait hâte de revoir son pays. Il y passa quelques semaines avant de se rendre à Lyon où se trouvaient déjà plusieurs de ses compagnons d’exil. Durant ce séjour en Vivarais, il subit la contagion de l’esprit de révolte et d’insurrection, depuis longtemps déchaîné dans ces contrées, et que transformait, en le surexcitant, la possibilité de se venger, apportée aux victimes par la journée du 9 thermidor. Trop généreux de cœur pour ne pas répugner aux représailles et aux vengeances telles que les exerçaient les chouans, par désir de contribuer à la restauration ou par besoin de donner un but à son activité, il se jeta dans leurs rangs avec, peut-être, l’espoir de les discipliner, de rendre moins barbare la guerre qu’ils avaient déclarée à la République et à ses défenseurs. Son nom, sa naissance, sa qualité d’ancien officier, tout le désignait pour exercer un commandement. Il est vraisemblable qu’au moment où la confiance de Lamothe et de ses compagnons l’envoyait auprès du Roi pour demander qu’un chef militaire fût préposé à la direction des mouvemens insurrectionnels du Midi, il se flattait de l’espoir d’être appelé ; à ce poste de confiance. Il quitta le Vivarais, au commencement de 1796, pour se rendre auprès du prétendant, à Vérone.

Les insurgés. Surville parti, imprimèrent à la propagande royaliste une impulsion plus vive. Livrés à eux-mêmes, n’ayant ni chefs, ni plan d’ensemble, ils tenaient, comme l’avait voulu Lamothe, le pays en haleine. Ils cherchaient à faire des prosélytes, allaient dans les maisons, et, pour décider les habitans à s’unir à eux, ils prodiguaient tour à tour les promesses et les menaces.

— Le roi nous envoie des chefs, à l’aide desquels nous nous vengerons, disaient-ils. Tout nous assure un prompt succès. Le Directoire périt de ses divisions. Les républicains s’égorgent entre eux. Grâce à ce désordre, nous avons pu nous assurer déjà plusieurs de leurs généraux. Partout, les troupes manquent pour défendre le gouvernement ; les gendarmes sont à nous ; ils nous aideront à massacrer nos ennemis, et, quand le Roi sera revenu, les propriétés des terroristes seront distribuées entre ceux qui