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Il en fut de même pour le schisme chaldéen, que M. Fournir parvint également à apaiser, par la restitution aux catholiques de l’église patriarcale de Mossoul, malgré les influences contraires d’une autre ambassade étrangère. Le Saint-Père en fut très heureux, et l’archevêque de Tarse, en Cilicie, de passage à Rome, me dit que, par l’apaisement de ces deux différends religieux, la France était en train de conquérir en Orient une influence beaucoup plus sérieuse qu’on ne pouvait se l’imaginer de loin, cette question d’influence religieuse au dehors a été fort discutée dans ces derniers temps par l’esprit de parti, mais il semble que, en dehors des sectaires acharnés contre l’Eglise catholique, l’accord soit bien près de se faire entre nous. Il est facile d’en comprendre les motifs par les raisons suivantes, qui avaient persuadé, dit-on, Gambetta lui-même. Je veux en dire un mot, puisque l’occasion m’en est offerte en ce moment.

Si les diverses communauté catholiques, au dehors, n’obtiennent plus de la France la protection qu’elle leur a. toujours accordée, elles recourraient, comme nous l’avons vu bien des fois, à l’Autriche, à l’Italie, à l’Allemagne, à l’Angleterre même, qui s’empresseraient de la leur accorder ; car il est de l’essence des pays d’Orient que, le faible s’y trouvant toujours sans défense et livré à la tyrannie ou à l’arbitraire local, cherche une protection autour de lui. Ce rôle, ne sera jamais vacant, et, le jour où la France renoncerait, pour sa part, à ce rôle traditionnel, qui a fait sa force et son honneur, elle verrait immédiatement sa place prise par d’autres puissances, au grand détriment de ses intérêts moraux et même matériels. Cette dernière assertion peut paraître un peu hasardée au premier abord ; elle n’est que rigoureusement vraie, car une nation avec laquelle on ne compte plus moralement perd bientôt le prestige qui lui est nécessaire pour protéger ses nationaux et obliger les gouvernemens étrangers à écouter ses réclamations.

De même qu’en Angleterre, en Hollande ! , en Belgique, en Suisse, les questions d’intérêts matériels priment facilement les autres, de même, en Orient, les questions religieuses seront toujours des questions d’intérêts positifs, et les premières de toutes. Nous l’avons vu lors de la guerre de Crimée. Nous avons retrouvé les mêmes impressions, il y a deux ans, lors du voyage de l’empereur allemand à Jérusalem. Nous le verrons bien des fois encore. Il semble, en effet, que, dans ces contrées plus voisines