Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 1.djvu/337

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Aussi voit-on percer chez les hommes d’Etat anglais, même chez les membres de ce cabinet conservateur-unioniste qui a fait la guerre sud-africaine et qui vient de recevoir un nouveau bill d’indemnité du pays par les élections d’octobre 1900, le désir d’obtenir de leurs colonies un concours financier. C’est avec discrétion que sir Michael Hicks Beach, dans un discours prononcé à Liverpool, le 24 octobre 1900, devant la Chambre de commerce, a touché ce point : mais il n’en a pas été moins curieux d’entendre de sa bouche des paroles comme celles-ci : « L’Empire s’est développé ; ce développement a exigé des dépenses croissantes. Comment y subvenir ? Chacun répondra : par le Trésor (Exchequer) impérial. Mais il n’y a pas de trésor impérial. Je voudrais qu’il y en eût un. Certainement rien ne fera consentir nos grandes colonies, qui se gouvernent elles-mêmes, à abandonner leur droit de s’imposer à une assemblée dans laquelle elles pourraient être en minorité contre les représentans du Royaume-Uni. Mais, avec un Empire qui s’agrandit, nous devrions avoir un système, beaucoup plus étendu que le système actuel, de contribution à la défense de cet Empire…. Je suis convaincu que toutes les colonies ont le sentiment qu’elles ne voudraient pas demander à la métropole plus de sacrifices qu’elle n’en doit faire pour la défense impériale. Je désire voir tirer parti de l’enthousiasme qui s’est emparé des sujets de Sa Majesté à travers tout l’Empire. Cela ne va certes pas sans grandes difficultés : si elles contribuent aux dépenses, les colonies auront une part de responsabilités dans la politique étrangère. Mais il convient de mettre à profit, les années qui viennent pour faire un pas dans la voie du principe de la défense commune de l’Empire. »

Un pareil discours prononcé par le chancelier de l’Echiquier jette un jour significatif sur l’état d’âme de nos voisins : après avoir fait les plus grands efforts pour lancer et entretenir ce mouvement impérialiste, dont l’envoi de quelques médiocres contingens au Cap devait être le témoignage éclatant, ils voudraient en tirer avantage pour soulager quelque peu les finances de la Métropole, dont ils commencent à ne plus envisager sans inquiétude les charges si terriblement accrues. Et cependant ces colonies, ou du moins certaines d’entre elles, auront elles-mêmes de grosses dépenses à supporter pour réparer les effets de la guerre : que deviendront le Cap et le Natal avec leurs revenus diminués, leurs chemins de fer à réparer, si le marché de