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Avant d’aborder l’examen des reproches qu’on fait aux congrégations dans le dessein de justifier les mesures prises contre elles pour les proscrire, est-il bien vrai qu’en fait elles soient proscrites ? Cela paraît hors de contestation, quand, d’une part, on voit la nécessité à laquelle elles sont soumises d’une autorisation préalable, et, d’autre part, les conditions dans lesquelles cette autorisation devra être sollicitée. Ici, point d’équivoques, point d’illusions ; il faut apercevoir bien au vrai la situation faite, celle qu’on a voulu faire, avec les conséquences qu’on a entendu y renfermer.

Ne peuvent se former sans autorisation donnée par une loi qui déterminera les conditions de leur fonctionnement : 1° les associations entre Français dont le siège ou la direction seraient fixés à l’étranger ou confiés à des étrangers ; 2° les associations dont les membres vivent en commun. Associations dont le siège ou la direction seraient fixés à l’étranger ou confiés à des étrangers, on sait que c’est le fait de la plupart des grandes congrégations d’hommes qui ont un représentant à Rome, près du Pape. Mais il n’y a point à s’arrêter à cette première catégorie, qui pourrait comprendre certaines distinctions, dès lors que la seconde englobe nécessairement tout le monde.

Le caractère spécial des congrégations religieuses, c’est la vie en commun ; toutes les congrégations d’hommes sont des associations dont les membres vivent en commun, donc toutes sont soumises à la nécessité de l’autorisation donnée par une loi. L’obtiendront-elles ? On peut trouver la réponse dans les lignes suivantes du rapport de M. Trouillot :

« Mais la commission a considéré que le retard dans le vote de l’autorisation que solliciteraient les associations visées par l’article 11 devait être considéré comme un refus d’autorisation. Toute autre solution aboutirait aux plus étranges conséquences, et notamment adonner une existence légale, assurée, à toutes les associations auxquelles les votes formels des Chambres l’auraient formellement refusée. Il suffirait, par exemple, à l’ordre des jésuites de demander à la Chambre l’autorisation prescrite, de laisser repousser leur demande par la Chambre, puis de la transporter au Sénat, sauf à la reproduire alternativement, dans les délais réglementaires, au Palais-Bourbon et au Luxembourg, pour bénéficier d’une existence parfaitement correcte et régulière qu’aucun régime n’a jamais voulu leur accorder. »