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aussi éloigné des excès de la Révolution que des violences du despotisme. J’ajoute qu’en tout cas, le décret de l’an XII a été remplacé par la loi du 2 janvier 1817, qui n’aurait pas sa raison d’être, si devaient subsister la loi de germinal an X comme abolissant les congrégations, le décret de messidor an XII comme les soumettant, pour naître et pour vivre, à l’obligation d’une autorisation délivrée par les pouvoirs publics.

La loi du 2 janvier 1817 porte : « Article premier. Tout établissement ecclésiastique reconnu par la loi pourra accepter, avec l’autorisation du roi, tous les biens meubles ou immeubles, ou recettes, qui lui seront donnés par acte entre vifs ou par acte de dernière volonté. — Article 2. Tout établissement ecclésiastique reconnu par la loi pourra également, avec l’autorisation du roi, acquérir des biens immeubles ou des rentes. » La loi du 24 mai 1825 dispose par son article 2 : « Aucune congrégation religieuse de femmes ne sera autorisée qu’après que ses statuts, dûment approuvés par l’évêque diocésain, auront été vérifiés et enregistrés au Conseil d’État. »

Pour qu’une congrégation puisse être reconnue, il faut d’abord qu’elle puisse exister ; donc la loi du 18 janvier 1792 est abolie.

Si aucune congrégation ne peut exister sans autorisation, il n’est pas nécessaire de le dire, puisque cela aurait déjà été dit par le décret de messidor an XII et que l’autorisation entraîne la personnalité civile, dont la conséquence est le droit d’acquérir et de recevoir ; donc le décret de l’an XII est considéré comme inexistant. La loi de 1817, comme celle de 1825, ne peuvent avoir de sens qu’autant qu’elles ont pour objet d’établir une distinction entre les congrégations reconnues et celles qui ne le sont pas, et c’est bien là, en effet, leur signification, comme l’a si bien expliqué M. Dufaure dans le passage précédemment rappelé de son discours prononcé devant le Sénat le 18 février 1880. Il y a des congrégations qui ont simplement une existence de fait ; libre à elles de continuer de vivre dans ces conditions. Que si elles veulent acquérir le bénéfice de la personnalité civile, elles en auront la faculté, mais nul ne pourra les y contraindre. Et, depuis près d’un siècle, les choses se sont passées ainsi, de sorte qu’il est absolument vrai de dire que jamais notre législation, celle dont on peut se prévaloir dans notre état politique et social, n’a soumis les associations religieuses à la nécessité d’une