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cette défense, censée humanitaire, qui supprimerait leur indépendance économique. La question se pose cependant très grave en tous pays, car l’ouvrière mère de famille est un rouage important dans la société, non seulement parce qu’elle aide à produire la richesse, mais parce qu’elle donne à la nation ses travailleurs, faute desquels la nation périrait. Dans la plupart des pays d’Europe, il est interdit, aujourd’hui aux femmes de travailler après leurs couches durant un laps de temps qui varie de quatre à six semaines ; il semble que l’Etat devrait, pour se faire obéir, assurer à la mère un secours qui n’aurait rien d’humiliant pendant le temps qu’elle est contrainte d’accorder au repos. La loi serait ainsi mieux respectée.

La Suisse protège les femmes enceintes contre les industries malsaines qui pourraient les empêcher de mettre au monde un enfant robuste ou seulement viable. Ce n’est pas le cas en Autriche où les mères de la génération future travaillent à la gueule des mines, aident les maçons sur leurs échelles, traînent de lourdes charrettes comme des bêtes de somme jusqu’à la fin de leur grossesse. Dans toute l’Allemagne, d’après le recensement de 1891, il y a cinq millions de femmes qui gagnent leur vie dans l’agriculture, les fabriques, etc., et un million en outre qui travaillent chez elles avec beaucoup plus de risques, car, partout, on le constate, le travail à domicile, regardé autrefois comme le seul qui convint à la mère de famille, ne doit plus être préconisé, du moins dans les grands centres. Les pires inconvéniens de l’atelier s’y glissent et s’y exagèrent, quand plusieurs personnes étouffent ensemble dans un réduit mal aéré. Pour les enfans eux-mêmes, les crèches, les écoles maternelles valent infiniment mieux que de pareilles conditions.

La propreté des logemens d’ouvrières devrait être sévèrement surveillée, comme eIle l’est en Amérique, à un double point de vue d’hygiène. Aux Etats-Unis la crainte des microbes fait sacrifier tout vêtement sorti d’une chambre qui peut être infectée de contagion ; les fréquentes maladies des enfans sont particulièrement redoutées ; il est reconnu que les étoffe, les fourrures s’en imprègnent et les propagent. Des inspectrices attitrées ont le devoir, si elles découvrent qu’il y a dans la maison le croup, la diphtérie, la variole ou toute autre affection contagieuse, de saisir les objets qu’on y fabrique et de les détruire sur-le-champ. La déclaration de ces maladies est obligatoire sous