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plusieurs de ses collègues adhéraient à la déclaration française : toutefois, le ministre de la Justice résistant encore, et le ministre de la Guerre n’étant pas de retour à Athènes, le Conseil n’avait pris aucune décision de gouvernement. Je le priai alors de m’accompagner chez le ministre de la Justice, et je repris devant eux la série des raisonnemens si clairs et si convaincant indiqués dans le télégramme de M. de Freycinet. En sortant de cette conférence, je ne doutais pas de leur opinion, et à bon droit, car, dans leur réunion de la journée, les conseillers de la couronne se trouvèrent unanimes. Le soir même, le secrétaire général des A flaires étrangères, M. Typaldo, venait, de la part de son chef, m’annoncer ce résultat heureux. Il m’apportait en même temps, et dans le langage le plus élevé, l’expression de la reconnaissance de la Grèce, et il me remit une lettre de M. Delyannis ainsi conçue : « Je m’empresse de porter à votre connaissance que le gouvernement royal a décidé d’adhérer aux conseils du gouvernement de la République. » C’était le succès de notre politique : la Grèce, dans sa pleine indépendance, déférait aux avis de la France et aux vœux de l’Europe, et s’engageait ainsi à ne pas troubler la paix. Le débat était clos par notre initiative et par sa sagesse (25 avril).


VIII

J’informai aussitôt de ces nouvelles M. de Freycinet et mes collègues, en demandant à M. Delyannis d’en prévenir ceux-ci sans retard, ce qu’il fit d’ailleurs dès le lendemain très correctement. Je fus donc extrêmement surpris lorsque le ministre d’Angleterre me fit savoir en leur nom que, malgré la communication du Cabinet grec, ils persistaient à lui adresser, sans changement, la noie comminatoire. Ils avaient, il est vrai, l’ordre antérieur de la remettre, mais, comme elle n’avait plus de raison d’être, au moins dans sa rédaction primitive, en présence de l’adhésion formelle du gouvernement hellénique, et comme il est de règle qu’un document doit être modifié quand un incident majeur transforme une situation, nous avions lieu de penser qu’ils jugeraient nécessaire de surseoir et d’en référer à leurs Cours. Toutefois, et bien que l’engagement de la Grèce fût parfaitement net et péremptoire, mes collègues, alléguant qu’il n’était pas assez significatif, résolurent de passer outre sans demander