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La Chine n’est donc pas un pays à étalon d’argent, mais un pays à double étalon, argent et cuivre : seulement il n’y a pas de rapport fixe entre ces deux métaux, et chacun d’eux est courant suivant les lieux, on pourrait presque dire selon les classes de la population, A l’intérieur, c’est en cuivre que se règlent la plupart des transactions, dont chacune prise isolément ne s’élève pas à une somme considérable. Le cours de la sapèque de cuivre par rapport au taël d’argent varie, avec une tendance générale à la hausse dans les derniers temps, puisque, au lieu de 1600 sapèques, qui formaient, il y a un quart de siècle, la contre-valeur du taël, ce n’est plus que 1 200 ou 1 300 qui la représentent aujourd’hui. Ce changement s’explique à la fois par la hausse du cuivre et la baisse de l’argent. A l’intérieur des provinces, le pouvoir d’achat de la sapèque ne parait pas avoir beaucoup varié, tandis que, dans les ports, celui du taël est régulièrement influencé par les fluctuations du métal blanc.

Au cours de leur histoire, les Chinois ont essayé de presque toutes les monnaies connues : papier, fer, argent, or, peaux de bêtes, pièces d’étoffe. L’empereur Che Hwangte frappa des pièces d’or pesant plus d’une livre, trois siècles avant Jésus-Christ : mais elles disparurent avec sa dynastie, dès la génération sui- vante. Cinq siècles plus tard, l’empereur Wuti fît fabriquer des monnaies d’argent et d’étain mélangés, auxquelles il essaya de donner un cours supérieur à leur valeur intrinsèque : instruit par l’expérience, il voulut ensuite revenir à la saine monnaie. Mais le désordre était tel et les contrefaçons si nombreuses qu’au siècle suivant, on proposa d’abolir toute espèce de signe métallique et de reprendre les grains et les étoffes comme instrumens d’échange et mesure de la valeur. Plus d’une fois déjà, les Chinois avaient connu le papier-monnaie, notamment sous les empereurs de la dynastie Sung (XIe siècle après J.-C). On en parle comme ayant existé sous la dynastie de Tcheou, de 1122 à 255 avant Jésus-Christ. L’empereur Ou-Ti, de la dynastie des Han, en 240 avant Jésus-Christ, fit créer des billets de banque en peau de cerf. Quoi qu’il en soit, les maux financiers ne furent pas étrangers au mouvement qui renversa la dynastie mongole (1368), pour la remplacer par celle des Ming. Toutefois le papier reparut sous ces nouveaux maîtres, qui punirent de mort les contrefacteurs. L’empereur Choenn-Tchou, en 1651, fut un de ceux qui eurent recours à ces émissions.