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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 juillet.


Que le parti libéral anglais traverse en ce moment une crise périlleuse, c’est une vérité tellement comme qu’elle ne mériterait pas d’être énoncée, si la crise ne s’était pas compliquée et aggravée depuis quelques semaines par l’espèce de démangeaison qu’ont éprouvée les principaux représentans du parti de raisonner à perte de vue sur les causes du mal et sur les remèdes à y apporter. Il est rare que ces consultations, ou ces examens de conscience faits en public produisent d’heureux résultats. Lorsqu’un parti est en pleine prospérité, qu’il a des chefs respectés et obéis, qu’il se meut suivant une orientation bien déterminée, enfin que le succès vient récompenser sa bonne organisation intérieure, tout le monde y est satisfait et il ne s’y élève qu’une voix pour louer sa parfaite tenue ; mais, dans le cas contraire, il s’en élève une multitude pour critiquer à qui mieux mieux la direction suivie et constater, en les déplorant, les déceptions survenues. C’est précisément le spectacle que nous a donné depuis quelques jours le parti libéral anglais.

L’homme qui en est le chef officiel, sir Henry Campbell Bannerman, a montré, depuis qu’il occupe ces hautes fonctions, beaucoup de bon sens et quelquefois de courage. Les difficultés qu’il devait rencontrer sous ses pas étaient de l’ordre le plus difficile et le plus délicat. Sans doute la situation du parti n’est pas brillante aujourd’hui ; mais elle ne l’était pas non plus lorsque sir Henry a été chargé de la très lourde responsabilité de succéder à lord Rosebery, qui avait succédé lui-même à M. Gladstone. Le vaisseau était, dès cette époque, complètement désemparé, et lord Rosebery s’y était montré un pilote insuffisant : il l’a reconnu lui-même en abandonnant le gouvernail. Il se plaint que le parti soit divisé ; on se plaignait autrefois de ce qu’il