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manque de hardiesse qui sauva peut-être l’armée ennemie[1]. Personnellement, il avait fait preuve d’entrain et de bravoure. C’était tout ce qu’on pouvait exiger de lui. « Ce qui ne se peut assez louer et admirer, écrivait Boufflers au Roi, c’est l’extrême désir que Mgr le Duc de Bourgogne a fait paraître de voir, de faire et de se porter partout, la sagesse et le sang-froid, et l’air libre et naturel qu’il conserve, sa gaieté, son coup d’œil et son bon esprit. En un mot, il met au jour toutes les qualités et parties qui font un grand homme et qui peuvent assurer qu’il sera un très grand et très bon général, el un très digne petit-fils de Votre Majesté[2]. » Il faut assurément, ici faire la part du courtisan ; mais Montrevel, un des lieutenans généraux, dans une lettre particulière à Chamillart, parle du jeune prince dans les mêmes termes : « Mgr le Duc de Bourgogne se porta partout. Il s’y est montré sous le feu des ennemis avec une fermeté et. une présence d’esprit dont tout le monde est charmé, et ce que le prince nous découvre chaque jour me donne personnellement de l’admiration et un ravissement véritable par rattachement que j’ay pour le Roy[3]. »

Le vieux roi était, lui aussi, dans le ravissement de ces témoignages qui lui arrivaient, de tous les côtés sur son petit-fils. La vivacité et la sincérité de son émotion se devinent à travers la dépêche qu’il adressait à Boufflers, en réponse à celle où le maréchal lui rendait compte de l’allaire de Nimègue. Peut-être son orgueil de grand-père s’exagérait-il même un peu la gloire qui devait résulter de cette affaire pour l’héritier de son trône. « Quoi qu’il n’ayt pas deffait les ennemis, ce qu’il vient de faire est si glorieux pour luy que la réputation de cette journée se présentera avec le même avantage dans les païs étrangers… Vous ne devés point douter, connoissant comme vous le faites la tendresse que j’ay pour luy, combien j’ai été sensible à tout ce qui s’est passé. Je ne devois pas être en doute de son courage. Ceux de son sang n’en ont jamais manqué ; mais la manière dont il s’est montré et la satisfaction des troupes m’en ont donné une que je ne puis exprimer. Vous y avés assés contribué pour que je témoigne celle que j’ay de votre attention continuelle à le faire valloir[4]. »

  1. Voyez, au Dépôt de la Guerre, un extrait de la Gazette d’Amsterdam.
  2. Dépôt de la Guerre, 1549. Boufflers au Roi, 11 juin 1702.
  3. Ibid., Montrevel à Chamillart, 13 juin 1702.
  4. Ibid., 1554. Le Roi à Boufflers. 17 juin 1702.