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se produit en un point, et le moment où l’effet s’en fait sentir en un autre point, l’observation la plus attentive ne peut saisir aucun intervalle. On croyait qu’il n’y en avait pas, que la transmission était, en quelque sorte explosive et foudroyante, en entendant ces mots comme exclusifs de toute durée ; en d’autres termes, que la vitesse de l’agent lumineux était infinie. Si deux points, situés avec la source lumineuse sur une même ligne droite, sont exposés au même instant précis à son action, il importerait peu que l’un fût près et l’autre loin ; ils recevraient la lumière au même moment, la différence de leurs distances, si grande qu’elle soit, étant nulle, en comparaison de la rapidité de la lumière. Voilà tout au moins ce que l’on croyait avant Bacon. Le célèbre philosophe mit en doute les fondemens de cette croyance : il émit l’idée que le phénomène de la transmission avait une durée appréciable. Galilée, un peu plus tard, la crut mesurable, et il tenta, en effet, de déterminer la vitesse du mouvement lumineux. Ce n’est que longtemps après que Rœmer y parvint, par une méthode astronomique, en utilisant les occultations du premier satellite de Jupiter. Ses calculs, corrigés par Delambre, ont fourni le chiffre de 310 000 kilomètres à la seconde. Les recherches ultérieures l’ont peu modifié. Les merveilleuses expériences de Fizeau, en 1839, celles de Léon Foucault à partir de 1850, les déterminations nouvelles de A. Cornu, en 1873 et 1875, permettent d’adopter, pour la vitesse de la lumière dans l’air, le nombre de 300 000 kilomètres, soit 75 000 lieues par seconde. Un des résultats incidens de ces recherches, obtenu par Foucault, est de la plus haute conséquence au point de vue de la doctrine de l’éther ; c’est, à savoir, que la vitesse de la lumière dans l’eau est plus petite que dans l’air. Ce résultat serait incompréhensible dans le système de l’émission.

La seconde de ces erreurs communes qui régnaient relativement à la propagation de la lumière, est celle de fa direction de ce mouvement. Que l’on ouvre un traité de physique, à l’article « lumière, » et l’on y trouvera, établie dès la première page, celle loi : « la lumière se propage en ligne droite, dans tout milieu homogène. » Mais cet énoncé que nos prédécesseurs prenaient dans son sens rigoureux et comme une vérité de principe, nous savons que c’est seulement une vérité approchée, c’est-à-dire, en définitive, une erreur. Et, cette assertion, en effet, inscrite au fronton de l’optique, comme un axiome, on la