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un réseau dont toutes les mailles se croisent et se tiennent.

Tout ce qui vit, en ce monde, l’homme comme l’enfant, les sociétés comme les individus, ont besoin d’une éducation. Les œuvres sociales les plus fécondes ne naissent pas d’elles-mêmes comme par une génération spontanée : elles se développent peu à peu, grandissent d’autant plus vite qu’elles imitent un modèle, suivent un exemple, s’appuient sur une expérience déjà faite. Telle est la conception très pratique et très nette qui a donné naissance, en 1889, aux comités de patronage.

L’enquête sur le travail, ouverte en 1886[1], avait mis en lumière tous les aspects de la question sociale : les Belges avaient vu de près les maux dont ils souffraient. Ils résolurent de susciter, à tous les degrés, sur tous les points du territoire, un ensemble d’efforts ; ils voulurent enseigner à l’initiative individuelle ce dont elle était capable. De ce mouvement sortit la loi qui encourageait les habitations ouvrières. Les comités de patronage ne furent pas chargés seulement « de favoriser la construction et la location d’habitations ouvrières salubres et leur vente aux ouvriers ; » leur mission fut bien autrement étendue : ils devaient « étudier tout ce qui concerne la salubrité des maisons habitées par les classes laborieuses et l’hygiène des localités où elles sont plus spécialement établies. » À cette enquête qui pouvait être si féconde, le législateur avait ajouté le devoir « d’encourager le développement de l’épargne et de l’assurance, ainsi que des institutions de crédit, de secours mutuels et de retraite[2]. »

Cette énumération qui avait la hardiesse d’embrasser toutes les solutions sociales n’était pas un de ces appâts électoraux que les partis aiment à inscrire sur une feuille de bulletin de lois et qui, le lendemain, voltige au vent de l’oubli.

Depuis dix ans, l’épargne, a presque triplé : le nombre des livrets est passé de 657000, en 1889, à 1 757 000, en 1900, des Sociétés de crédit se sont constituées. 15 000 habitations ouvrières sont déjà sorties de terre sans que le mouvement se ralentisse, la mutualité s’est considérablement développée, et, en présence de l’obligation allemande, en face des hésitations

  1. Le 15 avril 1886, était commencée en Belgique une enquête générale, qui a été le point de départ de toutes les réformes accomplies depuis quinze ans.
  2. Voir la loi du 9 août 1889 et le règlement du 7 juillet 1891.