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diminue, bien au contraire. Un maître en ces matières, mon confrère M. Gréard, a montré combien, comme pédagogue, pour employer un mot que la langue contemporaine a remis en usage, elle était en avance sur son temps. Il lui a fait le double honneur de commencer par une étude, à elle consacrée, son livre sur l’Éducation des femmes par les femmes, et de tirer des écrits qu’elle a laissés un substantiel petit volume d’Avis sur l’éducation. Il n’y a rien à dire après lui ; mais je voudrais m’arrêter un instant à montrer Mme de Maintenon dans son rôle de supérieure laïque, dirigeant Saint-Cyr au temporel et au spirituel, non pas seulement au point de vue de l’éducation des demoiselles, mais à celui de la discipline monastique et de la conduite des religieuses. Elle n’y apparaîtra pas au-dessous de la tâche qu’elle avait assumée.

Supérieure laïque, elle l’était bien en effet, non pas seulement par l’autorité qui s’attachait à elle comme fondatrice et que confirmaient les lettres patentes d’institution de la Maison, mais par une désignation spéciale et particulière. La Communauté des dames de Saint-Louis avait bien une supérieure, nommée à l’élection pour trois ans, mais une commission de l’évêque de Chartres, approuvée par le Pape, avait en 1689 nommé Mme de Maintenon supérieure spirituelle (situation, je crois, unique) et elle en exerçait les fonctions avec beaucoup d’application et de minutie. Elle avait commencé par régler le costume des religieuses, mais elle n’avait pas osé l’arrêter de façon définitive, sans avoir sollicité auparavant l’approbation du Roi. Pour l’obtenir, elle fit revêtir le costume projeté à sa femme de confiance, la fameuse Nanon, et la présenta au Roi. Le Roi approuva tout, sauf la coiffure qui était fort simple : « Quel diable de petit bonnet est-ce là ? » dit-il. Mme de Maintenon sourit sans rien dire et, quelques jours après, Nanon apparut avec un autre bonnet un peu moins simple, que Louis XIV approuva. Il aurait voulu aussi que les religieuses eussent de beau linge, et qu’en particulier leurs chemises fussent de toile de Hollande. Mais Mme de Maintenon trouva que la toile ordinaire était plus conforme au vœu de pauvreté, et elle tint bon. Dans l’administration intérieure de Saint-Cyr, elle se mêlait des moindres détails. Suivant son expression, « elle s’abîmait dans les marmites » au point d’expliquer, par exemple, dans une lettre à Mme de Butéry qui exerçait les fonctions d’infirmière, comment il fallait faire le