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que cette station s’est peu à peu déplacée sur la rive de la Liane, suivant en cela la loi naturelle de tous les ports situés dans l’estuaire d’un fleuve qui tendent toujours à se rapprocher de la mer à mesure que le thalweg s’exhausse, que la vallée se rétrécit, s’encombre de dépôts, et que le flot de marée a plus de peine à la remonter et la remonte en effet beaucoup moins haut.

Le Portus Itius de César et de Strabon n’était donc pas précisément sur le même emplacement que Gesoriacum, mais devait très vraisemblablement, comme le dit fort bien M. Desjardins, « se trouver plus avant dans la Liane et dans les conditions de sécurité et de commodité constamment requises par les Gaulois et même par les Romains pour l’établissement de leurs ports, à l’abri des vents et des coups de mer et à portée des bois et des matériaux de construction. Tels ont été sans exception les ports océaniens : Burdigala, Bordeaux, très avancé dans la Garonne ; Portus Santonum, le Brouage, protégé par l’île d’Oléron ; Portus Secor, dans la baie de Bourgneuf, abrité par l’île de Noirmoutier ; Portus Namnetum ou Vicus Portus, Nantes, enfoncé dans la Loire ; Corbilo et Portus Veneda dans le trajectus qui séparait alors les îles du Croisic et de Batz du continent ; Portus Brivates sur l’ancien canal naturel qui faisait communiquer la Grande Brière avec la mer ; Portus Vindana, Lockmariaquer et Port Navalo, dans les rivières de Vannes et d’Auray ; Gesocribate, Brest, dans le goulet de la Penfeld ; Caracotinus, Harfleur, dans l’embouchure de la Seine. »

Il est donc très probable que le Portus Itius s’étendait jusqu’à Isques, à 7 kilomètres en amont de l’embouchure actuelle. Il s’allongea successivement jusqu’à la ville gauloise de Gesoriacum, qui occupait à peu près l’emplacement de la colline qui domine le faubourg de Brecquerecque et au pied de laquelle était le portus Gesoriacensis, abrité par une grande île, qui s’est conservée pendant tout le moyen âge et a fini par se souder à la rive droite. On peut enfin considérer que l’anse des Tintelleries fut aussi autrefois une petite darse ; et il est probable qu’avant d’être comblée, elle porta le nom romain de Bononia, qui est devenu celui de la ville moderne, Boulogne.

Quant au portus superior ou ulterior mentionné par César à 8 milles au-dessus de Portus Itius, il est assez naturel de le placer à Ambleteuse. Ce pouvait être une sorte d’avant-port du port principal, il ne devait pas y avoir de port inférieur, au Sud