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pensons qu’on ne verra, dans notre promptitude à l’accepter, que la preuve du dévouement le plus entier et le plus désintéressé, et c’est ce qui nous a déterminés à entrer dans vos vues dès la première ouverture qui nous a été faite. Assurément, la personne que vous avez désignée serait à votre disposition comme tout membre de notre compagnie ; mais, comme vous vous en rapportiez à notre choix, nous avons cru que, malgré les grandes qualités de celui que vous demandiez, un autre serait plus propre à l’emploi que vous lui destinez, et nous nous en sommes expliqués ouvertement avec M. le marquis de Foresta. Il est entré dans nos raisons, et nous lui avons proposé celui qui aura l’honneur de se présenter à vous sans le moindre délai. Nous osons espérer que vous trouverez en lui les qualités nécessaires à son emploi. Nous répondons du moins de son zèle et de son dévouement. Ses instructions consisteront à entrer entièrement dans vos vues, en tout ce qui peut se concilier avec l’esprit de notre Institut, lequel, comme vous le savez, est entièrement étranger à la politique.

Vous n’ignorez pas, Monsieur le baron, que tout membre de notre compagnie doit, autant que possible, avoir son compagnon ; en conséquence, nous vous donnons le double de ce que vous demandiez, et le second est bien en état d’aider le principal et même de le suppléer en cas de besoin. Il n’est pas nécessaire que je vous dise qu’il ne peut être nullement question d’appointemens. L’entretien convenable à de pauvres religieux, c’est tout ce qu’il faut, tout ce qu’ils peuvent accepter. Ils auront toute la récompense qu’ils peuvent désirer si Dieu daigne répandre ses bénédictions sur leur ministère, et si le succès répond à l’attente qu’on a bien voulu s’en former. Puissions-nous, après deux siècles et demi, donner une nouvelle preuve de la reconnaissance éternelle que notre compagnie a vouée au grand monarque dont votre auguste élève porte le nom.

Je me trouve heureux, Monsieur le baron, d’avoir cette occasion de vous renouveler l’assurance de mes anciens et invariables sentimens pour vous[1] et pour tous ceux qui vous sont chers. Vous savez que je ne vous oublie pas dans mes faibles prières, et je vous prie d’agréer l’hommage du profond respect avec lequel je suis,

Monsieur le baron,

Votre très humble et très obéissant serviteur,

J.-L. ROZAVEN.


III

C’est en juin 1833 qu’arrivent les P. P. Déplace et Druilhet. Le baron de Damas avait donné rendez-vous chez lui à MM. Barrande et Déplace, pour faire à ce dernier la remise des livres et cahiers concernant la partie de l’instruction dont il allait être

  1. Le P. Rozaven avait connu le baron de Damas en Russie ; il avait contribué à le ramener à la pratique de sa religion, que le jeune officier avait oubliée, dans le milieu tout imbu de la philosophie du XVIIIe siècle où il se trouvait, à l’école des cadets et à l’armée.