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Mais non, il n’y a pas d’acier si dur qu’il soit infrangible ou impénétrable à l’acier, et voici peut-être le plus grand miracle. Jusqu’ici l’homme, pour produire le métal, le traduire en sa forme et le conduire à sa fin, a eu la collaboration surhumaine, quasi divine ou infernale, du feu. Le feu est venu à son aide, pour amollir, fondre, dissocier, réassocier le fer et l’acier. Maintenant c’est l’acier seul, à froid, qui va rogner, entamer, scier, couper l’acier, sans le moindre bruit ni le moindre grincement. Je me rappelle un armurier de Tolède qui prenait une pièce de deux sous et tranquillement, sur le seuil de sa boutique, pour l’émerveillement des passans, la perçait d’un coup de poignard. Mais ici, c’est bien autre chose que le bon poignard de Tolède ! La roue dentée, mue par un pouvoir supérieur, entre dans le bloc d’acier et le tranche, avec la même facilité que le couteau entre et tranche dans le beurre ou dans le savon. Les copeaux d’acier volent autour de la machine à raboter, moins légers, mais tout aussi minces que les copeaux de sapin, et s’enroulent comme eux en tortillons. L’ajusteur travaille l’acier comme le menuisier travaille le bois ; il y fait des coupes et des assemblages. A l’usine A, les ateliers de l’ajustage et du blindage sont, eux aussi, à deux équipes de jour et de nuit, et dans chacune d’elles il y a, sous les ordres d’un contre-maître, des tourneurs, des raboteurs, des fraiseurs, des perceurs et des manœuvres.

C’est le dernier service actif de l’usine, ou l’avant-dernier, si l’on compte comme actif le service de l’entretien. Normalement, ce service n’est que de jour ; point de service de nuit ; mais survienne une réparation urgente, et tout de suite il se dédouble en service de jour et service de nuit. Il comporte d’ailleurs toutes les subdivisions possibles, de façon à parer à tout événement ; toutes les catégories ou spécialités s’y retrouvent et s’y rencontrent : contre-maîtres ; pointeurs pour la comptabilité ; chef-chaudronnier, chaudronniers ; chef-forgeron, forgerons ; frappeurs ; chef-maçon, maçons ; chef-électricien, aides-électriciens ; chefs-chauffeurs de chaudières, chauffeurs ; chefs-alimenteurs, alimenteurs ; chefs-machinistes, machinistes ; chefs-monteurs, etc.

Les services auxiliaires sont au nombre de six, à savoir :

M. — Bureau des études ;
N. — Comptabilité ;
P. — Laboratoire ;
H. — Magasin ;