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ferro-nickel avait renforcé chaque point faible à mesure qu’il était menacé. Ce n’est qu’au bout de ces efforts que la catastrophe inévitable s’est produite.

Ces aciers au nickel peuvent exister sous deux états absolument différens, et nous venons précisément d’assister au passage de l’un à l’autre. Dans le premier état, ils sont d’une dureté médiocre ; ils cèdent à l’action du marteau, c’est-à-dire sont très malléables ; ils ne possèdent pas de propriétés magnétiques, bien que l’un et l’autre des composans les présentent. Il est difficile de considérer, dans ces conditions, l’alliage comme un simple mélange, état dans lequel la propriété magnétique devrait être la moyenne des propriétés des deux corps mélangés.

Dans le second état, au contraire, ces ferro-nickels sont durs, cas-sans, résistans à la traction et fortement magnétiques. Une traction énergique et d’autres actions mécaniques, telles que le laminage, le tournage, font passer le métal de la première condition à la seconde. Le chauffage à la température du rouge cerise, au contraire, les ramène, en sens inverse, de l’état dur et magnétique à l’état mou.

Quand la température change, on constate que ces ferro-nickels s’allongent ou se rétractent, et qu’en même temps ils modifient leur constitution chimique. Mais ces effets, comme ceux qui se passent dans le réservoir de verre du thermomètre, ne sont pas acquis en une fois. Ils se produisent pour une partie rapidement, et lentement pour un petit reste. On voit des barres de ferro-nickel, conservées à la même température, changer graduellement de longueur pendant le cours d’une année tout entière. Peut-on trouver de meilleurs exemples de cette activité intestine qui règne au sein d’une matière si différente de la matière vivante ?


A. DASTRE.