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rois, vice-rois, sujets annamites, cambodgiens, laotiens, même les Chinois d’origine qui ont eu confiance dans la protection de la France.

Chantaboon, que nous occupions depuis dix ans, sera évacué.

Un point essentiel a été négligé : l’acte additionnel du 14 juillet 1870 au traité du 15 juillet 1867 ne délimite que la province de Battambang et ne parle pas de la partie contestée entre Compong-Prac et le golfe de Siam. Or, la cour de Bangkok a fait occuper la côte jusqu’à la pointe Samit, ce qui lui attribue la possession des deux provinces de Ko-Kong et de Krat, d’une superficie de 7 000 kilomètres carrés, dont le Cambodge, avec raison selon nous, réclame la restitution ainsi que celle des îles maritimes voisines. Faisons-nous tacitement cette nouvelle concession au Siam ? Le silence du traité semble l’indiquer.

En compensation de sacrifices qui compromettent la sécurité et les finances de l’Indo-Chine, nous déconsidérant aux yeux des Asiatiques, quels avantages retirons-nous ?

La cession d’une langue de terre inondée, d’une superficie de 80 kilomètres carrés, située sur le Grand Lac où hier encore nous exercions une entière souveraineté ; la restitution des deux provinces cambodgiennes de Melou-Prey et de Bassac, d’une superficie totale de 12 500 kilomètres carrés, dont la population ne dépasse pas six mille habitans : la première est une forêt noyée ; la seconde, un peu plus fertile, ne couvrira pas ses frais d’administration.

Quant au privilège que nous garantit l’article 4 en réservant à nos ingénieurs la construction des ports, canaux et chemins de fer dans la partie siamoise du bassin du Mékong, il est de pure forme. Cette contrée ne saurait d’ici longtemps être exploitée intensivement, et si des travaux y sont entrepris, ce sera uniquement à dessein de détourner notre commerce et de menacer nos frontières.


Les négociations internationales sont devenues si compliquées depuis l’introduction des affaires coloniales dans la politique européenne, tant d’intérêts divers et fréquemment contradictoires sont à ménager, qu’il est impossible de discerner les mobiles qui ont dicté les résolutions des négociateurs, sans être au courant des secrets des chancelleries.

Quel rôle occulte a joué l’Angleterre, notre éternelle rivale ?