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cause protestante avaient compris qu’il n’était pas possible d’enlever, du premier coup, la couronne impériale pour un des leurs. L’élection immédiate d’un empereur protestant, à supposer qu’elle fût possible, c’eût été probablement la fin de l’Empire. On voulait seulement, pour cette fois, arracher le sceptre à la maison d’Autriche. Tout concourait : l’empereur Mathias mourait sans héritier direct ; Ferdinand de Styrie n’avait pas été élu roi des Romains. Les peuples souffraient et leur inquiétude était grosse d’un changement. Dans ces conditions favorables, il était possible, il était habile, et il était suffisant d’opposer à Ferdinand un prince, fût-il catholique, à la condition qu’il ne fût pas un Habsbourg. La difficulté était de trouver un candidat.

Du temps de François Ier, dans des conditions analogues, on avait pensé au roi de France. Henri IV eût peut-être osé ; mais il ne pouvait être question de son frêle et timide héritier. Il y avait bien, en Europe, un prince qui muguetait tous les bons morceaux et notamment ceux qui provenaient du lent délabrement de la maison d’Espagne : c’était Charles-Emmanuel, duc de Savoie. Il avait l’appétit très éveillé du côté de l’Allemagne, et il rappelait volontiers ses origines germaniques et son titre de vicaire de l’Empire en Savoie et en Piémont, ce qui le rattachait suffisamment à la hiérarchie germanique ; dans, le plus grand secret, il soutenait, de ses subsides, l’armée de Mansfeld qui pouvait être d’une singulière utilité à l’heure opportune ; mais il était Italien ; son frère était cardinal et les protestans endurcis ne lui pardonnaient pas son manque de foi et ses entreprises réitérées à l’encontre de la Rome huguenote, Genève.

Il y avait, enfin, un candidat qui eût eu les plus grandes chances : c’était Maximilien de Bavière. Par la situation de ses États en Allemagne, par son autorité personnelle, par l’unanime attention qui se tournait vers lui, il était comme désigné. On n’attendait qu’un signe de sa part. Mais la Bavière, sous sa direction, allait jouer, une fois de plus, le rôle ambigu qui lui est réservé en Allemagne, entre le Nord et le Midi, suscitant bien des espérances, n’en réalisant que peu et ne tirant, en fin de compte, de son avantageuse position et de sa double politique, qu’un bien mince profit : « Bavière, comme dit le document contemporain, prompte à changer de roupille et à faire un demi-tour à gauche, inopinément. »

Politique moins simpliste que Ferdinand, Maximilien était