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nuancées. Les uns la portent rouge, bleue et or ; les autres, verte, rouge et or ; ceux-ci, blanche et noire ; ceux-là, blanche et or. Cette casquette est plutôt une toque, qui ne tient à la tête qu’au moyen d’un cordon élastique serré à l’occiput.

Tous ces jeunes gens se battent pour rien,… c’est barbare et jeune, mais c’est vivant.

Du reste, la plupart sont très travailleurs, surtout à Göttingen, où les occasions de s’amuser sont plus rares que dans une grande ville, et où la bière mousse moins qu’à Berlin ou à Leipzig.

Les professeurs jouissent d’une grande considération. Ils font leur cours avec une bonhomie et une simplicité qui supposent une grande science. Ils arrivent dans leur chaire sans apparat, ne boivent pas la plus petite goutte d’eau fraîche, parlent comme s’ils étaient à leur table de travail, et les étudians sont tous, avec leur cahier, écrivant sous la dictée du maître.

Je trouve cela très neuf, très significatif. Cela prouve que les maîtres font autre chose que de répéter un manuel et qu’ils enseignent du nouveau.

Je quitterai Göttingen le 1er août, et je me dirigerai droit vers Munich. Je tiens à voir une des grandes Universités de la Bavière et de l’Allemagne du Sud. Ecrivez-moi un mot là, poste restante.

Je suis heureux des nouvelles que vous me donnez de vous et des vôtres. L’air de la mer sera bon pour Jeanne et aussi pour sa mère. Combien j’aurais voulu prendre part au grand acte religieux de sa première communion ! Ce sera plus tard le jour de la petite Marie : j’y serai.

Je regrette bien d’apprendre que la santé de votre ami, M. de V…, ne se remet pas. Mais je songe à sa grande foi et à son grand courage moral : cela me rassure sur lui. Après tout, ces vertus supérieures comptent seules dans la destinée humaine, et il faut estimer heureux, malgré tout, ceux qui l’ont compris.

Quelque riches que soient la littérature et la science religieuse de l’Allemagne, je ne vois aucun livre qui puisse utilement être traduit dans notre langue. D’abord la rédaction de ces ouvrages ne convient en rien à notre public français : c’est trop lourd, trop ennuyeux. Autant la poésie allemande est lumineuse, ailée, grandiose,… autant la prose est enchevêtrée et leur science embrouillée dans l’exposition.