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la substance. Il la digère, de la même manière que ferait l’estomac d’un animal supérieur ; c’est-à-dire qu’il réduit la matière rouge, l’hémoglobine, à l’état d’un dépôt noir d’hématine difficilement assimilable, tandis qu’il absorbe le reste du globule. C’est cette matière nuire, improprement appelée mélanine, dérivée de la substance rouge ferrugineuse du sang, qui devient l’un des signes accusateurs du paludisme. L’hématozoaire traîne avec lui, pendant quelque temps, ce pigment, signe accusateur de ses déprédations et reliquat de sa digestion ; puis il le rejette, au moment où il procède aux actes préparatoires de sa reproduction. Ces débris pigmentaires sont recueillis par les globules blancs, par les cellules endothéliales de la paroi des vaisseaux, et c’est ainsi que les organes richement vascularisés, le l’oie, la rate, le rein, le cerveau lui-même, prennent cette coloration noirâtre ou terreuse qui, à l’autopsie, est le signe révélateur et le trait signalétique qui atteste la maladie palustre. Les anciennes écoles de médecine connaissaient cette coloration brun noirâtre que peuvent prendre, en certaines circonstances, le foie et la rate, et l’attribuaient, pour le premier de ces organes, à la « bile noire » de Galien ou « atrabile. » Mais ce fut seulement au xviiie siècle qu’un médecin célèbre, Lancisi, aperçut nettement la relation de cause à effet entre ce noircissement des organes et la fièvre paludéenne.

Tout globule rouge parasité est condamné à une destruction plus ou moins rapide ; et c’est par là que s’explique l’une des conséquences fatales de l’infection palustre, l’anémie. Cette anémie est plus ou moins profonde suivant le nombre des globules atteints. Dans les cas graves, il y a un globule attaqué pour cent globules sains, c’est-à-dire un hématozoaire pour cent hématies. La proportion peut s’élever, dans les cas extrêmes, à un pour dix ou même à un pour trois. L’anémie est alors mortelle. L’invasion de l’élément sanguin par le parasite provoque les phénomènes immédiats de l’accès fébrile. Il y a vraisemblablement ici, — comme dans tous les conflits de ce genre, — la production de quelque substance toxique par le parasite qui attaque ou par l’hématie qui se défend, et c’est ce poison répandu dans les veines qui agit sur le système nerveux et provoque le frisson et les autres symptômes.

Il reste à rendre compte du caractère périodique et explosif de ces accès. L’explication a été fournie par un savant italien,