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grands fleuves, c’est-à-dire précisément dans les régions riches en moustiques. Il n’y a point de doute que ce ne soit une maladie infectieuse. Mais l’agent en est mal connu. Ce n’est pas ici le lieu de discuter les opinions qui ont été mises en avant, au sujet de sa nature parasitaire et, particulièrement, de décider si le bacille de Sanarelli caractérise la maladie elle-même ou quelqu’une de ses complications possibles. Cette ignorance où nous sommes de la nature exacte du parasite de la fièvre jaune n’est pas pour nous gêner. Elle n’empêche point, puisque nous sommes certains de sa nature épidémique et contagieuse, de rechercher quels peuvent être les modes et procédés par lesquels elle se transmet. La question paraît, aujourd’hui, bien près d’être résolue, grâce aux expériences exécutées l’année dernière par la commission américaine de Cuba. Il semble établi qu’ici encore c’est le moustique qui propage le mal au sujet sain et qui sert ainsi de courtier à la contagion.

Il n’est pas nécessaire, pour comprendre l’économie de ces expériences, de posséder des notions très étendues sur la maladie. Il suffit de savoir que la marche en est toujours rapide et quelquefois foudroyante. On peut s’en faire l’idée, plus ou moins schématique, que voici : le mal débute, le plus souvent, d’une manière brusque, par un violent mal de tête, avec courbature, frissons et fièvre. Puis surviennent des nausées et des vomissemens accompagnés d’une sensation douloureuse à l’épigastre. Cette première période dure trois à quatre jours, après quoi les accidens digestifs s’accentuent ; les vomissemens deviennent hémorragiques, noirs ; et pendant ce temps les troubles viscéraux se manifestent par un ictère plus ou moins prononcé (jaunisse). Le malade est emporté du quatrième au huitième jour, ou bien il entre en convalescence. L’issue est, le plus souvent, funeste. — Il faut savoir encore qu’il existe une immunité naturelle contre la fièvre jaune, et une immunité acquise par une attaque antérieure de la maladie. Il faut connaître, enfin, ce fait qui, d’ailleurs, a été vérifié à nouveau par la commission cubaine, que l’agent infectieux existe dans le sang. En effet, le sang d’un malade injecté sous la peau d’une personne saine donne à celle-ci la fièvre jaune.

Ces notions très simples étaient certainement familières à tous les auditeurs qui assistaient, pendant le mois d’octobre 1900, aux séances du Congrès tenu à Indianopolis par les membres de l’Association américaine pour la santé publique, et qui entendirent l’exposé des recherches de MM. Reed, Jas, Carroli et Agramonte sur la propagation de la fièvre jaune. Ces expérimentateurs avaient essayé d’obtenir des cultures