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avec le sang d’une trentaine de sujets atteints du vomito negro et ils s’étaient assurés que le bacille de Sanarelli n’y existe qu’accessoirement. Ils s’étaient livrés, enfin, à une expérience plus hasardeuse en essayant de contaminer onze personnes ; ils les avaient exposées aux morsures de moustiques (Culex faciatus) qui, auparavant, avaient piqué des malades en cours de vomito negro. Deux de ces sujets avaient pris la maladie.

L’expérience avait donc réussi en partie ; mais la proportion des échecs était encore trop grande pour autoriser une conclusion ferme. Il fallait connaître la raison de ces échecs. Une nouvelle campagne était nécessaire.

Elle fut entreprise immédiatement. On établit, dès le mois de novembre 1900, une sorte de camp sanitaire, dans les environs de Quemado (île de Cuba), sur un terrain inculte, salubre, bien drainé et bien exposé. Le personnel de la mission comprenait treize personnes, dont quatre seulement immunisées, et deux docteurs, MM. Ames et Cook. C’étaient d’ailleurs des individus jeunes, vigoureux, bien portans, qui venaient de subir une quarantaine d’observation et étaient, par conséquent, indemnes de toute contamination extérieure. Le camp était protégé, enfin, par un cordon sanitaire. Les médecins avaient à leur disposition une collection de cousins vivant dans des tubes et qui avaient piqué, à des époques plus ou moins rapprochées, des malades atteints de fièvre jaune. Ils eurent aussi des caisses de linges contaminés provenant des hôpitaux de Las Animas et de Columbia barracks, — caisses qui ne devaient être ouvertes qu’au moment nécessaire. Des hommes de bonne volonté consentirent à se prêter aux expériences. Disons tout de suite qu’aucun ne fut victime de son dévouement.

Le résultat de ces recherches peut se dire en deux mots : à peu près tous les sujets qui furent piqués, dans les délais convenables, par les moustiques contaminés contractèrent la maladie. Inversement, restèrent indemnes tous ceux qui, dûment préservés de la piqûre des moustiques, s’exposèrent aux causes banales jusqu’ici invoquées, couchant dans les draps souillés par les déjections des malades, dans une chambre à ventilation défectueuse, à la chaleur humide de 33°. Ce régime, continué pendant trois semaines de suite, en renouvelant chaque jour les linges, les draps, les couvertures souillés, resta sans aucun effet. Les trois personnes qui s’y étaient prêtées sortirent de l’épreuve en parfaite santé.

La commission cubaine a même imaginé une sorte d’expérience