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indispensables ne lui sont plus marchandés dans les Chambres, averties par la panique parlementaire de Langson, qui faillit compromettre à tout jamais la conquête du Tonkin, malgré la force des situations acquises. Quel chemin parcouru depuis les exécrables mêlées où, plus d’une fois, les ennemis de la France trouvèrent au Palais-Bourbon un champ de bataille plus favorable que le théâtre de la guerre !

Actuellement, l’examen des crédits coloniaux donne lieu à des débats rigoureux, dignes de gens d’affaires également soucieux du succès de l’entreprise commune et de l’épargne des deniers engagés. Si ce n’est pas encore tout à fait l’image d’un conseil d’administration, ce n’est déjà plus le tumulte du champ de foire, et cette pacification parlementaire n’est pas un des moins glorieux triomphes de l’idée coloniale, qui a survécu aux plus lamentables défaillances de notre politique : l’abdication de Fachoda elle-même a trouvé, en regard du discrédit dont elle nous a momentanément affectés, une compensation matérielle d’une indéniable valeur dans l’obligation imposée au gouvernement de presser la réalisation de notre programme naval, la mise en défense de nos points d’appui (Bizerte, Dakar, Diégo-Suarez, cap Saint-Jacques, etc.) et l’installation d’un réseau de câbles sous-marins en rapport avec les nécessités actuelles de notre souveraineté et des intérêts qu’elle développe.

Un des indices les plus significatifs de la considération qui s’attache maintenant aux questions coloniales, naguère si décriées, c’est la modération du langage que l’on entend dans les discussions économiques engagées en ce moment même à leur occasion sur les principes fondamentaux de la doctrine. La Protection et le Libre-Echange, — depuis longtemps en présence sur les confins de nos possessions tropicales, qu’elles devaient inévitablement se disputer, — en viennent aux mains une fois encore et rompent la trêve de 1892, qui, après un violent combat, avait laissé l’avantage aux adversaires de la porte ouverte. À l’exception de quelques cas spéciaux, fondés sur des contrats antérieurs ou sur les difficultés du fonctionnement des douanes dans certaines zones, nos colonies étaient incorporées dans le régime douanier métropolitain, pour ce qui concernait leurs importations ; quant à l’exportation des denrées coloniales, elle était admise à l’entrée en France au demi-tarif ; c’est-à-dire que : 1° les