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qu’écouter, et qui ne doit se mêler d’autre chose, insinuant pourtant ce que je croyais être de l’intérêt du Roi. » La meilleure attitude est, ajoute-t-il sagement, de « faire faire tous les pas aux autres, et d’attendre les expédiens qu’ils pourraient proposer, sans engager Sa Majesté en nulle manière du monde, leur disant que c’est leur affaire de remettre leur pays en liberté et M. de Witt à la tête des affaires. »

Louvois, mis au courant, approuve fort cette façon d’agir : « Je commence toujours mes lettres par des animadversions, écrit-il[1] ; mais je veux continuer celle-ci par des louanges. On ne peut mieux répondre que vous avez fait à celui qui vous a parlé de la part de M. de Witt. Continuez et, sans lui rien donner par écrit, laissez-lui entendre que le Roi oublierait volontiers la méchante conduite de son ami et ne serait point fâché de le voir remonter sur sa bête. » D’ailleurs, dit plus loin le ministre, « si M. de Witt veut parler ou envoyer quelqu’un avec qui l’on puisse parler plus clairement, il sera très bien reçu, et il peut s’assurer que personne n’aura connaissance de la négociation qu’il aura fait faire avec le Roi. »

Sur cet encouragement, les pourparlers s’engagent ; et la correspondance de Louvois et de Luxembourg indique plus nettement sur quelles bases repose tout ce projet d’entente. L’idée fixe (le Jean de Witt est toujours de briser l’influence anglaise en Hollande, et de libérer sa patrie de la domination de la maison d’Orange. L’instant, croit-il, est favorable ; bien des gens « se repentent déjà d’avoir élu le prince Guillaume pour stathouder, » et « cette faction péricliterait sans doute, » si le roi de France faisait mine d’accorder certaines concessions[2]

  1. Luxembourg à Louvois, 27 juillet.
  2. . Le Grand-Pensionnaire, à coup sûr, est trop bon patriote pour vouloir la paix à tout prix, et, s’il peut consentir à l’abandon de quelques territoires, ce n’est que pour mieux assurer dans le présent et dans l’avenir l’indépendance de son pays. Luxembourg ni Louvois ne repoussent d’emblée ce programme. Ils font simplement observer que, le gouvernement anglais marchant pour le présent Lettre du 24 juillet 1672. — Une partie de la correspondance qui existe aux Archives de la (luerre pour l’année 1672 a été imprimée à La Haye en 1759, sous le titre de Cammigne de Hollande en 1672, sous les ordres de M. le duc de Luxembourg. Quand je citerai les lettres qui ont fait l’objet de cette publication, je me bornerai à en indiquer la date, sans renvoyer le lecteur, comme je ferai pour les autres, aux tomes du Dépôt de la Guerre où se trouvent les originaux.