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I

On a beaucoup parlé du pacte colonial, à propos des mesures économiques dont il est question ; on a accusé M. Méline, de vouloir rétablir le système d’exploitation despotique que M. Depincé résume dans cette formule concise : « Tout de la métropole, tout à la métropole, tout par la marine métropolitaine. Elle exprime convenablement les principes essentiels d’une législation, qui fermait aux produits coloniaux tout autre marché que celui de la mère patrie, en même temps qu’elle réservait aux produits de celle-ci le marché des colonies, le pavillon national étant de rigueur pour les transports dans les deux sens. Cette stipulation, pivot de tout le mécanisme, avait sa raison d’être en un temps où le développement de notre marine marchande répondait aux nécessités du commerce français. Dans les conditions présentes, il ne viendrait à l’esprit de personne de rétablir une grave disposition restrictive, qui n’aurait même plus l’excuse de se trouver en rapport avec nos moyens d’action.

Si donc le pacte colonial devait revenir sur l’eau, ce serait en toute liberté quant au pavillon, et ses deux clauses primordiales ne reparaîtraient que délestées de leurs charges les plus lourdes et les plus oppressives, à savoir, le monopole exclusif au profit de la France continentale et l’unilatéralité du contrat. Aussi bien, il ne s’agirait plus, cette fois, de prohibition, et tout se tiendrait dans la mesure d’une protection discrète, d’autre part, les colonies trouveraient, dans la perception des droits acquittés par les marchandises étrangères présentées à leurs guichets (en moindre quantité il est vrai qu’il n’en passerait par la porte ouverte), une certaine compensation à la perte du bénéfice de la libre concurrence dans leurs acquisitions. Menus profits qui s’additionneront à l’énorme avantage résultant pour la production coloniale du privilège, — non plus imposé comme jadis, mais offert, — d’introduire en toute franchise ses denrées, dans les ports de France.

Or, savez-vous comment cela se chiffre d’après les données officielles ? Nous consommons chaque année pour plus de 1 200 millions de denrées coloniales, dont les neuf dixièmes proviennent des nations étrangères, alors que nos colonies, avantagées