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tous ses noms, — c’est-à-dire la doctrine physico-chimique de la vie.

Il y a donc encore, actuellement, en biologie, des représentans de ces trois systèmes qui toujours se sont disputé l’explication des phénomènes vitaux : il y a des animistes, des vitalistes, des unicistes. Mais on devine bien que d’hier à aujourd’hui, il y a tout de même quelque chose de changé. Ce n’est pas en vain que la science générale et la biologie elle-même ont fait les progrès que l’on sait, depuis la Renaissance et surtout pendant le cours du XIXe siècle. Les vieilles doctrines ont été obligées de se réformer, de renoncer à des parties caduques, de parler un autre langage, en un mot, de se rajeunir. Les néo-animistes de notre temps, ni M. Chauffard en 1878, ni M. von Bunge en 1889, ni M. Rindfleisch plus récemment, ne pensent exactement comme Aristote, saint Thomas ou Stahl. Les néo-vitalistes contemporains, qu’ils se soient illustrés en physiologie comme Heidenhain, ou en chimie biologique comme Armand Gautier, ou en botanique comme Reinke, ne parlent pas, entre 1880 et 1900, le même langage que Paracelse au XVe siècle et Van Helmont au XVIIe siècle, que Barthez et Bordeu, à la fin du XVIIIe, ou seulement que Cuvier et Bichat au commencement du XIXe. Enfin, les mécanicistes eux-mêmes, qu’ils soient des disciples de Darwin et Hæckel comme le plus grand nombre des naturalistes de notre temps, ou des disciples de Lavoisier comme la plupart des physiologistes actuels, sont loin des idées de Descartes. Ils rement le grossier matérialisme du célèbre philosophe. Ils ne font pas, à son exemple, de l’organisme vivant une machine montée, uniquement composée de rouages mécaniques, de ressorts, de leviers, de pressoirs, de cribles, de tuyaux et de soupapes ; voire même de matras, de cornues, d’alambics, réalisant les fermentations, les alcalinités, les acidités et les effervescences qui expliquaient, pour les chimiatres tels que Sylvius Le Boë, tous les phénomènes de la vie.

Tout cela a changé, au moins dans la forme. Les vieilles doctrines ont subi, — à n’envisager même que ces trente ou quarante dernières années, — des modifications plus ou moins profondes. Ces déformations, rendues nécessaires par les acquisitions de la science contemporaine, permettent d’en apprécier les progrès. Elles sont parfaitement propres à rendre compte de la marche des idées générales en biologie. À ce titre elles méritent