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dans le fonctionnement sont réglées par l’agencement, c’est-à-dire par les dominantes issues de l’intelligence du constructeur.

Ainsi en est-il dans la machine vivante : les dominantes, dans ce cas, ce sont les gardiens du plan, les agens de la finalité. Il y en a pour régler le fonctionnement du corps vivant : il y en a pour régler son développement et sa construction. — Telle est la seconde forme, la forme philosophique, finaliste et outrée du néo-vitalisme contemporain.


VIII

La doctrine uniciste ou moniste offre une troisième manière de concevoir le fonctionnement de l’être vivant, en nivelant et confondant ses trois formes d’activité, spirituelle, vitale et corporelle. Elle a eu son expression dans 1’« iatro-mécanicisme » et dans l’« iatro-chimisme, » au XVIIe et au XVIIIe siècle, et, plus récemment, dans la doctrine physico-chimique de la vie, d’une part, enfin, d’autre part, dans le « matérialisme contemporain. »

Le matérialisme n’est pas seulement une interprétation biologique, c’est une interprétation universelle qui s’applique à toute la nature, parce qu’elle repose sur une conception déterminée de la matière. On se retrouve ici en face de l’éternelle énigme qui s’est posée à la curiosité des philosophies relativement à ce problème fondamental, de la force et de la matière. On sait quelle solution lui donnèrent les philosophes d’Ionie, Thaïes, Héraclite, Anaxagore et Démocrite, qui écartèrent toute puissance spirituelle, étrangère à la matière, du gouvernement de celle-ci. L’explication du monde, l’explication de la vie, étaient réduites au jeu des forces physiques ou mécaniques. Épicure, un peu plus tard, soutenait que la connaissance de la matière et de ses diverses formes rend compte de tous les phénomènes et, par conséquent, de ceux de la vie.

Descartes, en séparant nettement le monde métaphysique, — c’est-à-dire l’âme définie par son attribut, la pensée, — du monde physique ou matériel caractérisé par l’étendue, aboutissait pratiquement au même résultat que les matérialistes de l’antiquité. Le corps vivant était pour lui une pure mécanique, comme il l’était pour eux.

C’est en cela que consiste la doctrine des iatro-mécaniciens