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ni les montagnes en général, ne se forment par soulèvement, comme ont pu le croire Léopold de Buch, Humboldt et Élie de Beaumont. Ce n’est pas une poussée verticale qui ride l’écorce terrestre.

On sait, au contraire, d’expérience certaine, par l’observation des reliefs continentaux et des dépressions marines, que le profil que prend la surface terrestre est le même que prendrait une lame flexible dont, suivant la formule classique, les extrémités fortement encastrées seraient contraintes à se rapprocher par une compression latérale. Dans le travail de formation des montagnes, « l’écorce s’est toujours comportée comme si elle avait été soumise à de puissantes actions de refoulement latéral, telles que serait capable de les produire la rétraction due au refroidissement. » Il faut admettre, de plus, que ces actions se compliquent, dans certains cas, d’écroulemens, d’effondre-mens le long de cassures plus ou moins rectilignes. Ces fractures, ces écroulemens, à leur tour, causent les tremblemens de terre ; d’autre part, ils ouvrent aux matières fondues souterraines une issue vers le dehors, c’est-à-dire engendrent les éruptions volcaniques.

Le mouvement orogénique qui devait créer l’ossature de l’Eurasie commença dans les premiers temps de la période tertiaire par la surrection de la chaîne des Pyrénées. Plus tard il se généralisa. Une poussée colossale, plissant dans toute sa longueur le sol méditerranéen, fit surgir en même temps que la grande chaîne des Alpes les chaînes parallèles des Carpathes, des Balkans, des monts d’Andalousie, l’Atlas et l’Himalaya. Ces formidables plissemens firent émerger des eaux une immense étendue de terre. L’Adriatique, le golfe du Lion, la mer Tyrrhénienne, constituèrent une seule terre ferme avec le nord de l’Afrique. Cet état de choses ne devait pas durer. Pour amener l’Europe, en particulier, à sa configuration actuelle, il fallut que des tassemens ultérieurs, des effondremens successifs y ramenassent les eaux marines. Et, enfin, c’est seulement à l’aurore des temps actuels, c’est-à-dire au début de la période quaternaire, qu’un dernier effondrement contemporain de la présence de l’homme, et qui paraît avoir laissé un vague souvenir dans la mythologie grecque, donna naissance au bassin de la mer Egée.

Il faut noter avec insistance que cette région européenne si récente, si nouvelle dans la série des époques géologiques, ne paraît pas avoir acquis partout son équilibre définitif. Ses tremblemens de terre témoignent des fractures et des effondremens que continue de subir la croûte terrestre. Ses volcans révèlent l’existence de lignes faibles par lesquelles la surface est mise en rapport avec le magma des