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présence ne se révélait que par le claquement des projectiles. De ces coups de feu, on ne perçoit ni le point de départ, ni la direction. Leur détonation même n’arrive pas.

Du côté de l’attaque, et sur tout le front, des pelotons de 20 à 30 cavaliers, à 5 ou 6 mètres d’intervalle, sont dispersés et comme indépendans les uns des autres. Au bruit des balles, ces groupes s’abritent au mieux et observent. On ne saurait rien de l’ennemi si son artillerie n’ouvrait pas le feu, et souvent les Boers se réservent. Alors commence, sur le seuil de la zone efficace du fusil, une période d’observation, d’attente et de tâtonnemens, pendant laquelle tout le monde espère voir se produire, quelque part en dehors de lui, un événement favorable.

C’est ainsi qu’au lieu d’être marqué par un redoublement d’activité de tous les organes de la découverte, le début de l’action est souvent caractérisé par une accalmie.

L’invisibilité de l’adversaire, le sentiment de l’inconnu, pèsent sur l’esprit de tous.

Les Anglais caractérisent d’un mot cette ambiance particulière et déprimante. Ils l’appellent War cloud.

L’offensive en est réduite comme renseignement à ce que découvrent les lunettes à 2 000 ou 2 500 mètres. On se rend à peu près compte de la direction générale de la défense. Mais, quand elle utilise des hauteurs, on ne sait si la ligne de combat est à la crête, comme à Dreifontein, à flanc de coteau, comme à Belmont, ou au pied des pentes, comme à Maggersfontein. Si l’ennemi utilise la ligne d’un cours d’eau comme à Modder-river, à Wiet-river, ou à Rhenoster, ce n’est qu’après le combat qu’on saura s’il s’est établi sur l’une ou l’autre rive, ou sur les deux.

Les Boers, étant montés, modifient quelquefois leur position au cours de l’engagement. Ils changent aussi l'emplacement de leurs canons, dès qu’ils s’aperçoivent que l’adversaire a réglé son tir.

Les renseignemens qui pouvaient être fournis continuellement par des patrouilles entreprenantes et heureuses n’avaient donc qu’une bien fugitive valeur. Le renseignement utile n’était donné que par le combat.

L’artillerie de la défense, ayant ouvert le feu, oblige à des mouvemens en tiroir, dans lesquels des compagnies d’infanterie montée, des escadrons de cavalerie, quelquefois aussi des unités plus fortes, se reconstituent derrière des abris. Ce sont les dimensions de ces abris qui règlent les effectifs qui les occupent ; ce