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avec le même calme qu’au polygone. On aurait pu se donner l’illusion d’assister à une manœuvre à double action. Cette illusion étant dissipée par la vue des hommes atteints, on éprouvait un véritable sentiment d’orgueil à voir ses semblables se conduire aussi bravement. »

Les projectiles de l’artillerie anglaise n’avaient qu’une efficacité insuffisante : « Nos shrapnels font peur aux Boers, mais ne les tuent pas, écrivait lord Methuen, leurs balles manquent de vitesse. »

Sous la protection du feu de leur artillerie, la cavalerie et l’infanterie montée prenaient alors leurs dispositions de combat. Une partie devait exécuter le combat de front et mettait pied à terre ; l’autre partie, restant à cheval, s’élevait sur les flancs, jusqu’au point où, la ligne de défense cessant d’être occupée, il devenait possible de la tourner et de la prendre à revers.

Le tableau que présentent les attaques anglaises est très clairement décrit par un témoin ; laissons-lui la parole.

« Généralement la tâche de mener le combat de front incombait à l’infanterie montée. Elle mettait pied à terre derrière les abris vers 2 000 mètres, y laissait les chevaux, puis, formant ses lignes de tirailleurs, elle s’efforçait de gagner du terrain. L’avance des combattans ne se faisait pas en général en dedans de la zone de 800 mètres, où le feu prend une précision extrême, grâce à l’absence de fumée et au caractère dénudé du terrain. Il semblait que, vers 800 mètres, on trouvait une barrière presque impossible à franchir.

« La formation adoptée pour traverser la zone de 2 000 à 600 mètres était une formation sur un rang à trois ou quatre pas d’intervalle, sans soutiens ni réserves. Tout le monde était en ligne. On ne cherchait pas d’ailleurs à produire sur cette portion du champ de bataille un effort violent. On comptait sur l’action des ailes, sur l’effet de l’artillerie, enfin sur l’arrivée des divisions. On cherchait surtout à gagner du temps et, le plus souvent, la chute du jour arrêtait l’attaque, de front, avant, qu’elle ait atteint le seuil de la zone de 800 mètres.

« La marche avait alterné avec le feu et s’était faite d’un abri à l’autre. Le terrain découvert était évité, non seulement pour y stationner, mais encore pour le traverser. Au début des opérations, les officiers donnaient par leur exemple le signal du mouvement. Ils profitaient d’une accalmie dans le tir et essayaient