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avait préparé un soulèvement général des Pays-Bas, qui devait coïncider avec une tentative du Prétendant et un débarquement des Français en Écosse. L’affaire d’Écosse ayant échoué, le soulèvement des Pays-Bas n’avait pas eu lieu, mais Bergeyck avait conservé des intelligences dans les principales villes, qui, accoutumées depuis longtemps à la domination espagnole et en majorité catholiques, supportaient avec impatience depuis deux ans la domination des Hollandais, sous le joug desquels elles étaient tombées après le désastre de Ramillies. Bergeyck proposa au Duc de Bourgogne de profiter des relations secrètes qu’il avait nouées dans les villes de Garni et de Bruges pour s’emparer, par surprise, de ces deux places. L’entreprise fut aussi heureusement conduite qu’elle avait été bien préparée. Tandis que d’Artagnan était détaché, avec un gros corps, pour masquer l’opération, Chemerault, à la tête de 3 000 hommes de cavalerie et de 2 000 grenadiers, filait sur Ninove, ville forte située sur la Dendre, à huit lieues de Braine-l’Alleud, et le lendemain, 4 juillet, il se présentait devant Gand, dont la porte avait déjà été surprise par une petite troupe d’Espagnols, partis, de leur côté, de Mons. Il y entrait triomphalement à la grande joie des bourgeois, et la garnison anglo-hollandaise, surprise, était obligée de se réfugier dans la citadelle, où elle capitulait deux jours après.

Le même jour, le comte de La Mothe entrait dans Bruges presque aussi facilement, et la nouvelle de ce double succès arrivait dans la nuit à Fontainebleau, où était alors la Cour. A huit heures du matin, le Roi faisait réveiller la Duchesse de Bourgogne pour lui apprendre cet heureux succès, et toute la Cour, dit Saint-Simon, était « dans une joie effrénée. » Deux jours après, il y avait grande promenade en forêt, sur la route de Moret. A six heures, le Roi était monté dans sa calèche avec la Duchesse de Bourgogne. Il avait fait préparer une collation dans une étoile qui était à gauche de la route de Moret. « Mme de Maintenon, rapporte Dangeau, était à cette collation. Il y avait deux ou trois carrosses de Mme la Duchesse de Bourgogne, pleins de dames, qui suivaient le Roi… On servit des collations à tous les convives et la fête se passa fort gaiement[1]. »

Le même jour et presque à la même heure se livrait la bataille d’Oudenarde.

  1. Dangeau, t. VII, p. 179.