La première traverse le Sahara presque en ligne droite, du Nord au Sud, et aboutit au lac Tchad. Sorties de Tripoli, les caravanes contournent le Djebel Rharian, puis s’élèvent sur les pentes du plateau crayeux qui étend ses champs de cailloux et ses rochers dénudés jusque près de Mourzouk. Quelques puits, çà et là, jalonnent la route et, dans cette première partie de leur course, hommes et bêtes ne restent que quatre jours sans trouver d’eau. Mourzouk, que nos géographies appellent pompeusement « la capitale du Fezzan, » n’est qu’une pauvre bourgade, et le Fezzan lui-même n’est qu’une série d’oasis de médiocre valeur ; mais de là rayonnent dans tous les sens, les pistes sahariennes : vers le Kouar et le Ouadaï, au Sud ; au Nord, vers Tripoli et la mer ; à l’Est, vers Benghazi, Djalo et l’Egypte ; à l’Ouest, vers Rhadamès et In-Salah. Le Fezzan est un carrefour, comme le Touât. Il n’y faut pas chercher un centre politique important ; le point où séjournent les caravanes et où s’opèrent les échanges a varié selon le caprice des nomades, tantôt Djerma, tantôt Zouila ou Trâghen, aujourd’hui Mourzouk. La ville, où, sauf quelques averses de printemps, il ne pleut jamais, n’a qu’une eau de mauvaise qualité, qui s’épand autour d’elle en marécages croupissans, et en fait un séjour malsain pour les Européens et infesté de malaria. Une longue rue, où s’ouvrent des boutiques, avec quelques ruelles perpendiculaires, constituent la triste « capitale » où réside un mutasserif turc et où campe une petite garnison. Quelques bœufs chétifs et de médiocre qualité, des moutons sans laine, des dattes, sont à peu près les seules ressources de ce pauvre pays.
Les caravanes, reposées et ravitaillées à Mourzouk, reprennent leur marche vers le Sud, s’arrêtent à Ghâtroun et entament la partie la plus pénible de leur voyage. « Des pierres, rien que des pierres[1], » voilà ce que l’on trouve de Mechrou aux oasis du Kouar. La longue traînée de ces oasis, dont Bilma est la principale, permet enfin aux hommes et aux bêtes de se refaire pendant quelques jours. Encore 120 kilomètres de dunes et l’on arrive à Agadem, où les pluies soudaniennes commencent à faire sentir leur bienfaisante influence ; il ne reste plus à traverser que la Tintoumma, une steppe désolée et très fatigante, et l’on arrive aux bords du Tchad. De Tripoli à Kouka, sur le lac, le
- ↑ De Saint-Louis à Tripoli par le Tchad, par le capitaine Monteil. Préface de M. E. -M. De Vogué. 1 vol. in-4o illustré ; Alcan.