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poisons véritables, destructeurs de la matière organisée ; c’est la violente intervention des agens physiques.


Les divers élémens anatomiques de l’organisme sont plus ou moins sensibles à ces perturbations qui causent la sénescence, la nécrobiose et la mort. Il y en a de plus fragiles, de plus exposés. Il y en a de plus résistans ; et il y en a enfin qui sont réellement immortels. On vient de dire que la cellule sexuelle, l’œuf, est dans ce cas. Il en résulte que le métazoaire, l’homme, par exemple, ne meurt pas tout entier. Considérons, en effet, un de ces êtres. Ses ascendans, peut-on dire, n’ont pas disparu tout entiers, puisqu’ils ont laissé l’œuf fécondé, élément survivant, d’où est sorti l’être que nous avons en vue ; et, quand celui-ci s’est développé, une partie de cet œuf a été mise en réserve pour une nouvelle génération. La mort des élémens n’est donc pas universelle. Le métazoaire se divise dès l’origine en deux parts : d’un côté, les cellules destinées à former le corps, cellules somatiques ; celles-là mourront. D’autre part, les cellules reproductrices ou germinales ou sexuelles, capables de vivre indéfiniment. On peut dire, en ce sens, avec Weissmann, qu’il y a deux choses dans l’animal, dans l’homme : l’une mortelle, le soma, le corps ; l’autre immortelle, le germen. Ces cellules germinales, comme les protozoaires dont nous avons parlé plus haut, possèdent une immortalité conditionnelle. Elles ne sont pas impérissables, mais, au contraire, fragiles et vulnérables. Des milliers d’œufs sont détruits et disparaissent à chaque instant. Ils peuvent mourir d’accident ; jamais de vieillesse.

On comprend maintenant que, si les protistes sont immortels, c’est parce que ces êtres vivans, réduits à une cellule unique, cumulent en elle les caractères réunis de la cellule somatique et de la cellule germinale, et jouissent du privilège attaché à cette dernière qualité.


VI

Il résulte de la doctrine cellulaire une conception des êtres vivans qui est singulièrement suggestive. Les métazoaires et les métaphytes, c’est-à-dire les êtres vivans polycellulaires qui s’offrent à la vue simple, et qui n’ont point besoin de microscope pour se révéler, sont un assemblage d’élémens anatomiques