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La Délégation chargée d’assurer la régularité des services dévolus d’ordinaire à toutes les directions du ministère des Affaires étrangères n’était composée, en dehors de son chef, que de quatorze personnes, dont huit seulement du cadre diplomatique, un ministre plénipotentiaire non encore installé, quatre seconds ou troisièmes secrétaires, et trois attachés ; les autres étaient des fonctionnaires des consulats, de la division des fonds et du chiffre. Ce petit nombre d’agens est parvenu toutefois à subvenir pendant cinq mois à toutes les affaires urgentes : dirigés, il est vrai, par un chef éminent, soutenus par leur énergique patriotisme, ils ont vaillamment porté le fardeau : nul d’entre eux assurément, dans le cours de sa carrière, n’a donné en si peu de temps une pareille somme d’efforts et de travail. Ils le devaient sans doute, mais il est juste de le rappeler.

La tâche de chacun de nous était d’ailleurs parfaitement circonscrite, sauf incidens exceptionnels. M. de Chaudordy conduisait toutes les affaires : la Délégation se concentrait en lui seul, en son initiative et en sa volonté. Il traitait toutes les questions avec les ambassadeurs étrangers ; il écrivait les télégrammes et nous donnait ses ordres avec une précision laconique et une remarquable clarté. Il menait son personnel en maître toujours bienveillant, et nous aimions son affable autorité. Auprès de lui, M. de Geofroy, ministre nommé en Chine, mais dont le départ avait été ajourné, répartissait le travail entre les attachés, veillait à l’ordre général, traitait les difficultés contentieuses et internationales, que son expérience lui rendait familières. M. Bourée, fils de l’ancien ambassadeur à Constantinople, consacrait l’activité de son brillant esprit aux divers travaux attribués à Paris au cabinet du ministre. M. Albert Sorel, qui est devenu depuis un historien de premier ordre et membre de l’Académie française, donnait au Délégué, dans des fonctions analogues à celles de chef du secrétariat particulier, l’utile concours de son jugement déjà mûr et de sa plume exercée. L’expédition des petites affaires et nos rapports avec les différentes administrations étaient confiés aux soins intelligens de M. Delaroche-Vernet, fils et petit-fils d’artistes illustres, qui devait, quelques années plus tard, être enlevé à la carrière par une mort prématurée, et je ne puis rappeler ici son nom sans une émotion affectueuse. Toute la correspondance politique avec nos ambassades et légations m’avait été remise par M. de Chaudordy : elle