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placés à une époque inconnue dans le fond de ce « marais » dont le quartier voisin de la Bastille a pris le nom ; tantôt les égouts, provisoirement barrés, se décollaient par le fond et inondaient le tunnel ; ou bien la nappe des eaux souterraines menaçait de l’envahir, lorsque l’on passait, près de la tour Saint-Jacques, à 14 mètres de profondeur sous la chaussée, et qu’on tremblait pour les maisons riveraines, alignées à 11 mètres de distance seulement. Au voisinage du Trocadéro, le terrain est miné jusqu’aux entrailles par d’anciennes carrières. Sans de nombreux puits de consolidation, il se fût effondré. Deux fois seulement, aux places de l’Etoile et de la Concorde, par suite d’un excès de hardiesse des entrepreneurs, le sol creva ou s’affaissa. L’expérience acquise nous garantit de ces accidens pour l’avenir. Certaines obstructions presque incroyables ont causé quelque gêne : si la station des Tuileries, par exemple, est ridiculement étriquée, c’est que l’Etat a refusé de laisser creuser sous le jardin, crainte d’altérer la symétrie des arbres sur la terrasse des Feuillans.

En de vastes ateliers, à Charonne, la Compagnie métropolitaine, chargée du ballastage et de la pose des rails, construit et entretient son matériel. Elle produit la force électrique nécessaire pour le faire fonctionner, à Bercy, dans une usine de 10 000 chevaux, capable d’envoyer plus tard, sur les diverses lignes, 6 000 kilowatts-heure. Le kilowatt, vendu par les secteurs parisiens un franc cinquante centimes, — 15 centimes l’hectowatt, — aux personnes qui emploient dans leurs appartemens ce luxueux éclairage, coûte ici vingt fois moins cher ; 8 centimes environ. Pour remorquer les huit voitures dont se compose un train, à la vitesse de 35 kilomètres à 1 heure, la dépense est de 45 kilowatts ; ce qui représente, en éclairage, la consommation de 1 280 lampes de 10 bougies pendant une heure et, en force analogue à celle des machines, l’énergie d’environ 60 « chevaux-vapeur. »

Cette énergie est livrée au rail du chemin de fer sous une forme plus concentrée, si l’on peut ainsi dire, qu’elle ne l’est aux ampoules incandescentes : sous la tension de 500 volts et non de 110. Supposez que l’électricité se transmette, non par un fil, mais, comme l’eau, par un tube : « ampère » représenterait le diamètre de ce tube, « volt » signifierait la vigueur avec laquelle l’eau y est chassée, et a watt » mesurerait en litres le débit obtenu, résultant de la poussée du liquide autant que de la largeur du tuyau.