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âmes douées d’une sensibilité supérieure, mais, à des degrés divers, par toute l’humanité pensante, qui n’a trouvé de secours contre elles que dans les religions et dans les philosophies. — C’est à ces tourmens que la science, à son tour, apporte aujourd’hui son secours. Des temps nouveaux commencent. La science est déjà armée contre la maladie : elle saisit corps à corps cet invisible ennemi : sa victoire est certaine. D’autre part, elle entrevoit le moyen de remédier à la vieillesse ; et, enfin, prolongeant la vie humaine jusqu’à son terme naturel, elle espère permettre à l’instinct qui fait un besoin et un plaisir de tous les actes normaux, de s’appliquer aussi à la mort nécessaire. La mort, alors, « le dernier ennemi qui sera vaincu, » selon l’expression de saint Paul, cédera à la force de la science. Au lieu d’être « le roi des épouvantemens, » elle deviendra, après une longue vie saine et exempte d’accidens morbides, un événement naturel et désiré, un besoin satisfait. Alors sera réalisé le vœu du fabuliste :


Je voudrais qu’à cet âge
On sortît de la vie ainsi que d’un banquet,
Remerciant son hôte, et qu’on fît son paquet…


Ce sont ces promesses merveilleuses qu’il faut maintenant examiner dans leur fondement scientifique.


III

La première des misères de l’homme, c’est son imperfection physique, ou, pour employer un mot de M. Metchnikoff, c’est l’ensemble des disharmonies de sa nature. Ces désharmonies sont nombreuses.

Dans un organisme bien réglé, lentement développé par adaptation, les instincts devraient être en rapport avec les fonctions, et les organes aussi. Cela n’a pas lieu chez l’homme.

Les exemples abondent. — La disharmonie de l’instinct de conservation est un des plus évidens. L’homme est soumis à la mort. Il n’a pas, comme beaucoup d’animaux inférieurs, le privilège de l’immortalité. Il périt plus ou moins fatalement. Il est, d’ailleurs, à cet égard, dans le même cas que les animaux supérieurs : mais, tandis que ceux-ci n’ont pas la notion de la mort et ne sont point tourmentés par le sentiment de leur fin inévitable, l’homme connaît et comprend cette nécessité. Il a,