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« Si la flotte autrichienne, dont l’armement s’exécute, quitte l’Adriatique avant la déclaration de guerre, Sa Majesté Italienne enverra un nombre suffisant de vaisseaux dans la Baltique, qui y stationneront pour être prêts à s’unir à la flotte de Sa Majesté prussienne, dès que les hostilités éclateront. »

Ce traité n’imposait à l’Italie que des devoirs et ne lui assurait aucun droit : il l’exposait à dépenser une centaine de millions inutilement, en frais de mobilisation, si la Prusse ne se décidait pas à la guerre. Mais il rendait Bismarck maître du roi, le roi maître de l’Allemagne, car il assurait le concours militaire sans lequel, comme Moltke ne cessait de le répéter, il serait dangereux d’affronter l’Autriche et les États moyens. Enfin il était une garantie contre l’intervention gênante du protecteur de l’Italie.


II

Soupçonnant la machination ourdie contre lui, François-Joseph prit un grand parti ; il fit dire à Napoléon III par Metternich : « Ni moi, ni mon peuple, ne saurions abandonner la Vénétie, fût-ce au prix d’une compensation octroyée par les puissances. Au contraire, une compensation obtenue par nous-mêmes des mains de la victoire, nous absoudrait aux yeux de la postérité de l’abandon d’une de nos plus belles provinces. Si, loin d’inquiéter l’Autriche et de paralyser par ses menaces une partie de ses forces, l’Italie, comprenant son véritable intérêt, laissait aux armées impériales toute leur liberté d’action contre la Prusse, la Silésie ne tarderait pas à devenir le premier terme d’un échange qui donnerait la Vénétie à l’Italie et permettrait désormais à la cour d’Autriche de marcher d’accord avec la France sur toutes les questions d’avenir. » Il proposait donc à l’empereur Napoléon III de lui céder la Vénétie, dont il pourrait disposer ensuite au profit de l’Italie dès que la victoire lui aurait permis de reprendre la Silésie et ne demandait en retour qu’une garantie de la neutralité italienne.

Metternich rencontre aux courses Persigny[1]et lui fait confidence de l’ouverture dont il a été chargé. Persigny court tout enflammé chez l’Empereur : « Dès que l’Autriche renonce à la

  1. Persigny place sa conversation avec Metternich à la fin de mai. C’est à la fin d’avril ou au commencement de mai qu’elle a eu lieu.