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Ils vont accabler l’ennemi
Biribi
A la façon de Barbari
Mon ami[1].


Mais c’était surtout contre le Duc de Bourgogne que les chansonniers s’acharnaient, et à sa piété qu’ils s’en prenaient. Ils établissaient un parallèle insultant entre le prince Eugène et lui :


Ce prince débonnaire
Le matin se levait
Pour faire sa prière,
Disant : chacun fasse ce qu’il sait faire
Pour moi, voilà mon fait.
Le Prince Eugène au contraire
Ah qu’il y va gayment !
Lille pris, passe hardiment
A travers la rivière,
Oh qu’il y va, ma bergère
Nostre bon duc disoit : ah ! ah
Voyant cela,
Mais à la messe il alla,
Car il étoit feste.
Hélas ! qu’ils sont beaux
Ces lauriers nouveaux,
Il en a sa charge.
Mais leur poids trop gros
Lui voûte le dos[2].


Ou bien ils faisaient gorges chaudes d’un propos assez vif que Gamaches, attaché cependant à la personne du Duc de Bourgogne, lui aurait dit en l’accompagnant à la messe, un jour où il aurait mieux aimé le voir à cheval. « Vous aurez le royaume du ciel, mais, pour celui de la terre, le prince Eugène et Marlborough s’y prennent mieux que vous. »

À ces railleries impitoyables, les rares amis du Duc de Bourgogne n’opposaient que le silence. Beauvilliers, « plus timide qu’il ne devoit l’être, » Chevreuse, « enchaîné de raisonnemens et de mesure » ne voyaient de remèdes que dans la patience et dans le temps, et, quand Saint-Simon les pressait « pour des partis

  1. Nouveau siècle de Louis XIV, t. III., p. 255.
  2. Le Chansonnier français, t. XI. Ces couplets sont attribués par le Chansonnier à l’abbé Grécourt.