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Excellence, a augmenté mes soins pour faire caréner les vaisseaux et commencer à les faire charger, afin qu’il n’y ait aucun retardement quand Votre Excellence arrivera dans ce port. C’est la chose du monde que je désire le plus, tant pour hâter mon retour que pour jouir du bonheur de faire la guerre d’un aussi grand soldat. J’espère que Votre Excellence voudra bien me recevoir au nombre des siens et me fournira les occasions de le persuader de l’envie que j’en ai et me donnera, pour son service, des ordres où je pourrai lui prouver mon aveugle obéissance[1]. »

Plus affirmatif encore et renchérissant sur les autres en affectation de dévouement comme en obséquiosité, le gouverneur de la Vera-Cruz, don Francisco Mansso de Zuniga, allait jusqu’à faire espérer que la flotte serait prête quand l’amiral arriverait dans ce port. « Votre Excellence verra, poursuivait-il, que, les fruits et l’argent étant presque tous en cette ville, on peut croire que la flotte sera bientôt chargée, et Elle peut être assurée que, par l’extrême attention que j’ai à lui rendre service, je contribuerai autant qu’il me sera possible au plus sûr et plus prompt accomplissement des ordres de Votre Excellence, à laquelle je prie Dieu, d’accorder un heureux voyage et de l’amener en cette ville en parfaite santé, afin que j’aie l’honneur de me mettre à son obéissance et la fortune de me mettre personnellement à son service[2]. »

Château-Renault, assurément, ne fut pas dupe de ces belles promesses. Il savait par La Ralde que, quand cet officier avait quitté la Vera-Cruz, le chargement des galions était à peine commencé ; mais, pensant en imposer par sa présence et éviter ainsi toute cause nouvelle de retard, il résolut de se rendre aussitôt au Mexique.

Depuis longtemps décidé, par suite de l’encombrement du port de la Vera-Cruz, à ne prendre avec soi que quelques bâtimens légers pour ramener les galions à la Havane, Château-Renault confia à Nesmond le commandement de l’escadre, lui laissant sur « ce qui paraissait le plus utile au bien du service » des instructions merveilleuses de précision comme de clarté.

L’amiral, sentant qu’avec aussi peu de forces, il lui serait difficile de surveiller ses derrières, soupçonnant en même temps les Anglais de vouloir l’attendre au retour sur le mouillage de

  1. 27 mars 1702. — Archives de la Marine.
  2. 26 mars 1702. — Archives de la Marine.